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28 avril 2010 3 28 /04 /avril /2010 22:31

« La défaite de la droite guadeloupéenne : Qu’est-il donc arrivé ? »
par Sully TACITE,
Ancien secrétaire départemental de l’U.M.P,
Membre de l’actuel comité départemental de l’U.M.P.

Jamais dans son histoire la droite locale ne s’était trouvée dans un tel état. Moins de quinze pour cent aux dernières élections régionales. Plus qu’une claque, c’est une véritable déculottée électorale. Par cette terrible défaite, la droite guadeloupéenne s’est enfermée dans une nasse politique où grouillent les partis qui n’ont aucune vocation à exercer le leadership ou la gouvernance régionale. Ce résultat d'une médiocrité effarante ne laisse pas d' interpeller, de soulever de lancinantes et d' épineuses questions.

Qu’est-il donc arrivé ? Comment peut-on si lamentablement perdre pied, trois ans seulement après le discours du « morne vergain » et le triomphe de Nicolas Sarkozy ? L’esquisse d’une réponse rationnelle suppose ici un nécessaire flash-back, pour retrouver le point de rupture, le moment-clé où tout a basculé.

Au commencement était le verbe. Et, en ce mois d’août 2008, en visite officielle en Guadeloupe, accompagnée de Marie-Luce Penchard, secrétaire national de l’UMP pour l’Outre-Mer, le verbe du ministre des affaires sociales Xavier Bertrand, secrétaire général adjoint de l’UMP, fixait la stratégie et sonnait la charge. « Je viens préparer la « Reconquête » affirmait-il martial dans une interview en date du 29 août 2008. Pour ceux qui à l’époque n’avait pas bien compris, la « reconquête » ainsi annoncée avait alors un nom et un visage : ceux de Marie-Luce Penchard. L’omniprésence de cette dernière lors de cette visite ministérielle prouve à l’évidence que, dès le départ, « la mission de la « reconquête » lui incombait personnellement. Et très vite l'étonnant dispositif se mit en place: d’abord secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer - après les évènements de janvier à mars 2009, puis, dans la foulée, ministre délégué auprès du ministre de l’intérieur - lors de la présentation des mesures présidentielles visant à sortir de la crise guadeloupéenne.

La mise en œuvre de cette stratégie allait rapidement conduire à des prises de décisions aux conséquences immédiates et cataclysmiques. Rouach ! Exit Sully TACITE, secrétaire départemental. Rouach ! Exit Gabrielle LOUIS-CARABIN, présidente élue de la fédération départementale. Rouach ! Exit Louis MOLINIER, secrétaire départemental. On fut abasourdi par ce stupide travail de sabre et de sape, mais on admira pourtant l’artiste. La démocratie du coutelas avait enfin trouvé son maître sabreur. Le glaive du crétinisme politique sabrait alors en diable les « ennemis de l’intérieur ». Cette délirante politique de décapitation systématique des dirigeants de l’UMP locale, fut énergiquement menée jusqu’à la fatidique heure de vérité : celle où, par le traitement démocratique, le masque de la reconquête se révéla n’être en réalité que le visage hideux de la défaite historique. 

Cette stratégie ministérielle nous a coûté cher. Très cher. Si cher que l’on ne peut taire le double dogme qui le nourrissait abondamment.

D’une part, celui d’une conception patrimoniale et archaïque du pouvoir. Celle qui considère que l’on hérite d’un parti, d’un canton, d’une mairie, d’une région,  …etc., comme on hériterait d’un meuble, d’un terrain ou d’une maison. C’est une vision antirépublicaine du pouvoir. Une conception biologique et clanique de la politique. Elle a pour conséquence essentielle de réduire les territoires en de vils fiefs familiaux, électoralement réservés en priorité aux progénitures d’élus usés et/ou en fin carrière. C’est l’adhésion des instances nationales de  l’ UMP à cette conception qui, principalement, explique la promotion fulgurante et la mise sur orbite de l’actuel ministre délégué à l’Outre-Mer. C’est elle qui a conduit la droite guadeloupéenne au crash politique du 14 mars 2010. La « penchardisation » de l’UMP  a abouti à la marginalisation électorale de la droite guadeloupéenne sur l’échiquier politique local.

D’autre part, le dogme du centralisme démocratique, hérité du marxisme léninisme. Ce principe de fonctionnement des partis politiques est une forme sournoise du « despotisme éclairé ». Résumé grossièrement, il revient à considérer que ce que décide le sommet doit être aveuglément observé et mis en œuvre par la base. Et la décision du sommet – singulièrement de son chef - ne peut alors souffrir d’aucune contestation.

C’est au nom de ce principe que Marie Luce Penchard s’est imposée comme tête de liste pour  l’Outre Mer aux élections européennes de 2009. À toutes les objections émanant de la base sur la pertinence de sa candidature, la réponse fusait cinglante et altière : « c’est le choix du président de la république ». Face à l’opposition véhémente mais de bon sens du président de l’UMP-locale, Gabrielle LOUIS-CARABIN, députée maire du Moule, l’interrogation flagellant revenait comme un boomerang au visage de la rebelle  rotulienne : « comment peut-on s’opposer au choix du président de la république ? ». 

De toute évidence, c’est le principe républicaine de l’infaillibilité qui est ici en œuvre. Le simple fait d’être oint de l’encens élyséen ou du bureau politique national, suffirait donc à faire d’un âne un génie, d’une piètre ambitieuse une nonne politique zélée, d’un homme - ou une femme - sans qualité un ministre de la république. Raisonnement par l’absurde dira-t-on, mais les faits sont têtus.

C’est en effet ce dogme du centralisme démocratique – décision prise par Paris et imposée aux instances locales - qui a été réitéré lors des élections régionales de 2010. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la défaite fut comme en 2009 désastreuse. Pour protester contre cette pratique scélérate de la « ciguë  politique », la fédération départementale de l’UMP en Martinique vient de se faire « hara-kiri », en procédant librement par vote de son comité départemental à son autodissolution.


D’autres éléments plus lointains mais toujours actifs ont également joué un rôle déterminant dans cette calamiteuse défaite. Les résultats des élections régionales font apparaître en Outre-Mer une ligne de démarcation  incontestée et incontestable. La droite non antillaise, guyanaise et réunionnaise, sort vainqueur de cette consultation. La droite antillaise, guadeloupéenne et martiniquaise, en sort au contraire éreintée et laminée.

L’une des raisons de cette différence se trouve évidemment dans leur positionnement respectif sur la question institutionnelle. Le refus de la droite réunionnaise et guyanaise de se lancer, en 2003, dans le débat sur l’évolution institutionnelle, les a manifestement protégés des fléaux qui ont liquidé la droite antillaise.

En refusant toute participation à ce débat institutionnel, la droite non antillaise a fait l’économie d’une division idéologique contreproductive en son sein. Elle évita de se draper dans le prêt à penser idéologique de l’extrême gauche. Elle n’a pas eu à expérimenter le mélange des genres. Elle n’a pas fait peur à ses militants, électeurs et concitoyens. La droite non antillaise est ainsi restée, dans l’esprit de son électorat, comme le rempart naturelle et fidèle contre toute aventure institutionnelle.

A l’opposé, par convoitise exacerbée du pouvoir, la droite antillaise a jeté le bébé départementaliste avec l’eau du bain. Par paresse intellectuelle, elle n’a eu d’autres préoccupations – depuis 1999 - que celle d’être le porte drapeau des visées autonomistes et/ou indépendantistes de l’extrême gauche. Au-delà de cette position, ce fut le néant de la pensée, le vide idéologique. Avec un facteur aggravant pour la Guadeloupe : le culte de la personnalité brandi comme horizon indépassable de la conviction politique. On pensait « mettre les hommes sous sa jupe », mais en réalité on s’est mis politiquement sous les talons idéologiques de Karam et de Marie-Jeanne. Et aujourd’hui, solidairement, on coule avec eux. En somme, pour la période considérée (1999-2010), la question de l’évolution institutionnelle aura donc été le « titanic » de la droite guadeloupéenne. Elle s’y est embarquée, pour mieux y sombrer. Telle est la simple réalité, la triste vérité. C’est ce que in fine l’histoire retiendra et rien d’autre. 

Mais si en politique l’histoire est une chose, la culture en est une autre. L’UMP locale s’est créée en 2006-2007 contre la volonté opposée du parti « Objectif Guadeloupe ». L’UMP locale, c’est l’anti-Objectif Guadeloupe. C’est le refus du culte de la personnalité et du parti unique. C’est la tentative de bâtir un parti exclusivement fondé, dans sa pratique interne, sur des valeurs démocratiques. C’est un parti qui veut incarner et assumer sans craintes ses valeurs idéologiques. Bref, c’est un parti démocratique et moderne. C’est cette culture qui anime et  unie ses militants et adhérents. Elle est à l’antipode de celle d’ « Objectif Guadeloupe ».

C’est cette donnée culturelle majeure qui explique que toutes les tentatives des anciens cadres du parti «  Objectif Guadeloupe », pour prendre la maîtrise de l’appareil de l’UMP locale, ont piteusement échoué. Cette « OPA » n’a pu finalement triompher - avec la complicité active des instances nationales du parti, que lors de la préparation puis de la constitution de la liste pour les élections régionales de mars 2010.

Nos militants, nos électeurs et nos concitoyens ne s’y sont pas trompés : cette liste des régionales de mars 2010 était en réalité une liste « chevriste », composée essentiellement des anciens cadres du parti « Objectif Guadeloupe », et de quelques survivants - revenants devrait-on dire - du pittoresque et non moins spectral parti « Le renouveau socialiste » de l’ancien maire des Abymes. On aurait voulu la défaite certaine de la droite guadeloupéenne que l’on n’aurait pas agi autrement.

La ficelle était grosse. Trop grosse pour nos militants et adhérents qui ont préféré aller voir ailleurs si l’UMP y était. Et c’est ainsi que la majorité de notre électorat a voté en masse pour les listes autres que celle pompeusement estampillée « majorité présidentielle ».

Les défaites comme les victoires se construisent dans le temps. La déculotté de mars 2010 est la résultante d’une volonté politique, affirmée dès le mois d’août 2008, de l’actuel ministre de l’Outre-Mer, de s’imposer coûte que coûte comme le nouveau leader providentiel de la droite locale. Cet entêtement imbécile a conduit la droite guadeloupéenne à sa plus grande catastrophe électorale. Elle risque désormais d’y sombrer définitivement.

Depuis le 14 mars au soir, un lourd silence tombal surplombe la droite locale. Et singulièrement l’UMP. Les armes des maîtres sabreurs se sont tues. Les « décapiteurs » sont aux abonnés absents. Et les bonimenteurs, claquemurés dans leur tour d’ivoire parisienne. Pourtant, de ce lourd silence, on entend sourdre l’éternelle question de nos militants et adhérents : non pas « que faire ? » - puisque nous ne sommes pas des « marxistes-léninistes », mais plus prosaïquement « Et maintenant ? ».

Sully TACITE  est ancien secrétaire départemental de l'UMP et membre élu de l'actuel comité départemental.




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commentaires

L
<br /> Ou va la droite sarkozyste monsieur Tacite?<br /> <br /> Daniel, 3 ans, retenu deux heures au commissariat de Juvisy<br /> Daniel revient du centre de loisirs avec son père. Celui-ci fait un détour pour s’acheter des cigarettes. Il est environ 17 heures, nous sommes le jeudi 22 avril 2010. Quand ils sortent du bureau<br /> de tabac, la police les attend près de la voiture : contrôle des papiers du véhicule, de l'identité de monsieur. Les papiers du véhicule sont en règle, pas ceux de monsieur. Cela ne fait ni une, ni<br /> deux, en policiers zélés, ils poussent tout le monde dans le fourgon : le père et le petit de trois ans.<br /> <br /> Quelques instants plus tard au commissariat de Juvisy : Daniel est seul avec son père dans une pièce vide. Son père est assis sur une chaise, menotté à cette chaise. Les policiers laissent l’enfant<br /> une vingtaine de minutes avec son père, puis viennent le chercher. Le petit ne comprend rien. Séparé de son père, il est terrorisé. Il pleure. Il fait ses besoins dans sa culotte.<br /> <br /> <br /> Pendant ce temps, ils ont appelé la maman : qu’elle vienne chercher son fils immédiatement, sinon ils le confient à un organisme. Lequel? Elle ne sait pas, elle ne retient pas le nom mais elle<br /> comprend qu’on la menace de la séparer de son fils. Elle est à plus d’une heure de trajet de Juvisy. Elle arrive au commissariat vers 19h, affolée, angoissée. Cela fait deux heures que l’enfant est<br /> avec les policiers. Ce soir-là, il n’a pas pu dormir. Il a pleuré toute la nuit. Il a fait pipi au lit.<br /> <br /> La deuxième nuit non plus, il n’a pas bien dormi : il a fait beaucoup de cauchemars. Il s’est réveillé plusieurs fois en pleurs.<br /> <br /> Pendant le temps de la garde à vue du papa, des militants RESF ont appelé le commissariat pour avoir des explications. L’officier de police judiciaire chargé du dossier a refusé de leur parler.<br /> <br /> Rappelons aux policiers que les articles 9 et 37 de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant stipulent qu'un enfant ne doit pas être séparé de ses parents et que nul enfant ne peut être<br /> privé arbitrairement de liberté.<br /> <br /> <br />
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L
<br /> texte bien travaillé mais analyse un peu orientée à la otes toi que je m'y installe ou réinstalle!<br /> <br /> En dénonçant le centralisme Elyséen( l'accord entre le Pc chinois et l'ump y est pour quelque chose) dans le choix d'un leader rejeté par les militants locaux, Monsieur Tacite omet de dire qu'il a<br /> bénéficier de ce coup de pouce presidentiel lorsqu'il fut designé secrétaire départemental.<br /> <br /> Habile et voulant atténuer l'effet boomerang de son argumentaire ,il se définit lui meme, à la fin de son exposé, comme ex secretaire et membre ELU du conseil executif local de l'Ump. N'appartenant<br /> pas a la masse des électeurs de droite, je me garderais bien de le considérer comme un "tambou a deu bonda" .Janus le dieu aux deux faces lui sied bien. Cette sentance vaut aussi pour le prévot de<br /> terre de haut Lou Mol . Ce dernier aurait debute son chemin de croix de reptation vers l'hotel de region pour tenter d'éponger les deficits communaux. A la Desirade nous connaissons la place du<br /> maire mendiant, a terre de haut nous avons notre place du maire hors la loi...Ensemble tout devient possible messieurs les ex secrétaires départementaux de l'ump.<br /> <br /> <br />
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