Monsieur le Président de GUSR, cher Guy,
Monsieur le Président d’honneur, cher Dominique,
Mes très chers camarades,
Je me réjouis que notre parti ait pris l’initiative de nous réunir ce matin afin d’aborder une question aussi fondamentale que la question institutionnelle.
Je voudrais à ce titre féliciter notre Président Guy LOSBAR et l’ensemble du comité directeur qui ont su tout mettre en œuvre pour que la qualité et le sens des responsabilités soient au rendez-vous de nos travaux.
Notre rencontre intervient en effet dans un contexte politique particulier au plan local comme au plan national au moment même où la Guadeloupe s’interroge sur son avenir et où tous les yeux sont aujourd’hui rivés sur nous.
Au moment où la France entière est dans la rue face aux coups portés par l’actuel gouvernement à un acquis social aussi fondamental que l’âge du départ à la retraite, poussant ainsi les parlementaires de Guadeloupe unie à monter au créneau, aux côtés de leurs collègues de Gauche,
Au moment où la Guadeloupe est traversée par un profond malaise, illustré par l’échec scolaire, par une jeunesse diplômée mais sans emploi, par la crise des institutions et de leur représentativité, par la multiplication des faits de délinquance, et par dessus tout par ce sentiment tenace d’une incapacité des guadeloupéens à bâtir ensemble,
Au moment où la Guadeloupe attend encore des réponses concrètes aux enjeux de son quotidien :
Je veux parler de la mise en œuvre effective du plan d’urgence pour l’emploi et la formation des jeunes, en particulier au bénéfice des jeunes de 16 à 25 ans,
Je veux parler des finances des collectivités locales,
Je veux parler de l’urgence d’un plan santé spécifique pour l’outremer,
Je veux parler de ces conflits sociaux qui perdurent,
Oui mes chers camarades, la Guadeloupe est à la croisée des chemins car tous ces sujets qui interpellent notre responsabilité politique sont les symboles d’une société qui va mal.
C’est donc à la fois en tant que parlementaire, en tant qu’exécutif départemental mais surtout en ma qualité de membre fondateur et militant de Guadeloupe Unie Socialisme et réalités que je m’exprime ce matin devant vous.
Je voudrais en cela affirmer combien l’enjeu politique fondamental de nos travaux, c’est tout simplement d’avoir la force de regarder l’avenir avec une conscience claire des objectifs à atteindre.
Et c’est pourquoi je souhaite axer mon intervention sur la question institutionnelle autour de trois valeurs fondamentales qui motivent l’engagement de chacun d’entre nous : les convictions, l’unité et le sens du Pays.
Les convictions, ce sont précisément celles qui sont à l’origine de la création de notre parti.
Un parti résolument ancré à gauche, qui a toujours nourri l’ambition de transformer la société pour construire une Guadeloupe non seulement plus juste et plus humaine, mais encore davantage soucieuse d’assumer sa culture, son identité créole et son vouloir être.
Un parti qui a toujours affiché l’audace d’éradiquer les vieilles pesanteurs coloniales ou néocoloniales.
Un parti qui a toujours fait de la question institutionnelle son cheval de bataille parce que nous sommes tous profondément convaincus que le maintien sur un même territoire d’une région et d’un département aux compétences enchevêtrées n’était pas viable.
Oui mes chers camarades, dès sa création, Guadeloupe Unie Socialisme et Réalités a toujours affiché son ambition de faire évoluer le pays vers une assemblée unique dotée de pouvoir renforcés.
Et c’est cette même ambition, ces mêmes convictions qui nous ont conduits à faire campagne pour le OUI en 2003…
Vous me permettrez à cet égard de revenir sur l’analyse de ce scrutin afin de prendre toute la mesure de cette réponse cinglante que le peuple guadeloupéen a apporté à la proposition que nous formulions, avec d’autres, il y a maintenant près de 7 ans.
Pour ma part, je pense que le peuple guadeloupéen a répondu non parce qu’il était confronté tout à la fois à un manque de clarté, à l’impression de suivre un chemin imposé, au sentiment de n’avoir pas participé, non pas seulement à la réponse, mais à l’élaboration de la question posée.
Je crois fermement que le peuple guadeloupéen a répondu non, tout d’abord parce que les enjeux d’un projet élaboré pendant deux ans par les élus et les experts et qui lui était soumis en deux mois lui étaient illisibles.
Les Guadeloupéens ont répondu non parce qu’ils ont craint que cette évolution ne les dépossède de la maîtrise de leur destin.
Ils ont répondu non, parce qu’ils ont craint qu’un modèle de société ne leur soit imposé qui ne soit pas le modèle de société auquel ils adhèrent.
Sans renier nos convictions, nous avons su tirer les enseignements politiques de cette situation.
Et c’est précisément cette profonde volonté de respecter le verdict du 07 décembre 2003 qui nous a poussé à initier avec le Président LUREL une synergie entre nos deux assemblées.
Une synergie sans complaisance qui, au-delà de l’amitié des hommes, n’a pour seule boussole que l’intérêt général, et qui a fait ses preuves dans des domaines aussi divers que la gestion de l’eau, les transports, le logement, la problématique des déchets, la gestion du foncier agricole, même s’il reste encore beaucoup à faire.
Mais le bon fonctionnement de cette synergie, pour salutaire qu’elle soit, n’est pas pour autant une fin en soi car nos convictions et notre sens des responsabilités nous imposent d’imaginer l’avenir de nos institutions bien au-delà des hommes qui les incarnent aujourd’hui.
Alors oui mes chers camarades, Guadeloupe Unie Socialisme et Réalités doit assumer ses responsabilités devant l’Histoire !
Et je veux le dire avec force, ce n'est pas par la confrontation et le conflit mais par le dialogue, le débat démocratique et le partenariat que nous ferons évoluer notre pacte social, car on est toujours plus fort ensemble.
C'est précisément la démarche que nous devons suivre à l’occasion de notre convention en gardant le cap des deux autres valeurs que j’évoquais en introduction : l’unité et le sens du pays.
L’unité c’est bien sûr tout d’abord celle qui doit prévaloir au sein de notre organisation politique !
A Guadeloupe Unie nous avons un sens aigu de la démocratie et du respect de la diversité des opinions.
C’est une démarche que nous pratiquons au quotidien et nous en avons d’ailleurs fait la démonstration lors des récentes échéances électorales.
Oui, nous avons eu des différences et nous avons eu le courage de nos convictions en assumant chacun nos positionnements respectifs lors des dernières régionales.
Avec d’autres camarades du parti nous avons eu l’occasion d’exposer les raisons qui nous conduit à ne pas suivre la ligne officielle de Guadeloupe Unie.
La Guadeloupe nous a donné raison d’effectuer ce choix mais pour autant nous n’avons jamais renié notre attachement, notre appartenance et notre implication au sein de notre parti.
Le comité directeur a tiré les enseignements des dernières élections, et tout comme Jeanny, tout comme Guy, je veux ici réaffirmer que Guadeloupe Unie est et demeure le socle de mon engagement en politique !
Alors, bien sur, la question institutionnelle est une question qui fait débat, qui fait parfois clivage, y compris au sein même de Guadeloupe Unie.
Mais le rôle de notre organisation et la portée de notre convention, c’est précisément de favoriser le débat d’idées pour parvenir à une synthèse adossée à une analyse fine du contexte politique actuel en mettant tout en œuvre pour préserver l’avenir.
L’unité mes chers camarades, c’est aussi bien évidemment celle de la Gauche guadeloupéenne sur la base du partenariat qui nous unit depuis de nombreuses années aux autres formations de socle de Gauche, la Fédération Guadeloupéenne du parti socialiste et le PPDG.
Nous connaissons les positions de ces deux organisations politiques sœurs, et je crois que le sens des responsabilités politiques nous impose précisément aujourd’hui de faire le choix résolu de l’unité.
Alors bien sur, l’unité n’est pas l’unanimisme !
L’unité n’est pas non plus le suivisme !
Non mes chers camarades, l’unité c’est une quête permanente qui doit nous conduire à afficher nos convictions tout en créant les conditions d’un accord avec nos partenaires sur cette question fondamentale.
Et c’est cette même recherche de l’unité qui doit nous conduire à adopter une position partagée qui préserve l’avenir et réponde à l’aspiration profonde du peuple guadeloupéen.
C’est cela mes chers camarades que j’appelle avoir le sens du pays !
C’est prendre la mesure des enjeux de la Guadeloupe et mettre tout en œuvre pour faire partager à nos compatriotes nos convictions !
Avoir le sens du pays c’est prendre la mesure de l’état actuel de l’opinion publique guadeloupéenne et envisager avec lucidité les choix qu’elle est susceptible de partager !
Avoir le sens du pays c’est appréhender sans fard notre aptitude à expliquer et convaincre !
Je sais que la réforme n'est pas une fin en soi, mais je sais aussi qu’il y a des moments où elle devient indispensable à condition qu’elle soit mise au service d’un projet qui cimente et refonde notre société.
Nous en sommes tous convaincus, cette refondation ne se fera pas en calquant purement et simplement un modèle d’évolution administrative imaginé pour la France hexagonale sans moyens supplémentaires.
Nous nous y opposerons !
Et c’est d’ailleurs le sens de l’amendement que j’ai déposé au Sénat devant la CMP chargée de plancher sur le projet de réforme territoriale en sorte que la Guadeloupe soit exclue de son champ d’application.
Cette refondation ne se fera pas non plus mes chers camarades, à la faveur d’une vision uniforme de l’outremer, car nous considérons que c’est à chaque peuple qu’il appartient de déterminer le rythme et les modalités d’évolution de ses institutions !
Et en m’adressant à nous mêmes, mes chers camarades je veux dire que l'avenir de la Guadeloupe, le modèle de société que nous voulons, ce n'est pas que l'affaire de quelques-uns, ce n'est pas que l'affaire de quelques experts.
Ce n'est pas que l'affaire des seuls hommes politiques.
C'est l'affaire de tout le corps social, de tous les citoyens et de toute la Guadeloupe.
La question de la gouvernance de nos institutions est bien sûr une question cruciale, mais elle n’est qu’une partie de la solution car la gouvernance est inutile si elle n’est pas mise au service d’une véritable ambition de transformer la société.
Transformer la société, c’est avoir le courage d’aborder sans tabou des questions de fond.
Transformer la société c’est questionner notre rapport au travail, l’individualisme qui gangrène notre société, notre rapport au territoire, notre relation à l’autre, nos rapports sociaux et notre relation à notre passé douloureux.
Transformer la société c’est apporter des réponses concrètes aux légitimes attentes de nos concitoyens en termes de perspectives économiques, d’emploi, de développement durable et de cohésion sociale.
En un mot, ce qui importe c’est avant tout l’élaboration d’un projet de société qui rassemble l’immense majorité des guadeloupéens.
Cela demandera, nous le savons, du temps et beaucoup d'efforts car chacun devra faire sa part du chemin, tenir ses engagements, accepter des compromis.
Et sur la question de la gouvernance je crois que le chemin du possible est étroit mais envisageable en conciliant nos convictions, l’unité du socle de la Gauche et le sens du pays.
Très concrètement le chemin du possible repose à mes yeux sur trois piliers fondamentaux :
Premièrement réaffirmer la nécessité de poursuivre le débat avec nos concitoyens pour l’élaboration d’un projet de société fédérateur, conformément à la méthode arrêtée par le congrès des élus départementaux et régionaux.
Deuxième pilier : créer les conditions d’un débat serein sur le volet de la gouvernance qui permette de formuler d’ici la fin de l’année au président de la république une proposition d’évolution de nos institutions qui réponde aux aspirations du peuple guadeloupéen sur la base d’un accord a minima des forces politiques de ce pays.
Troisième pilier : nous mobiliser sur le terrain à la faveur d’une position commune pour faire partager nos convictions au plus grand nombre de Guadeloupéens.
Cela veut dire refuser la réforme territoriale telle que l’actuel gouvernement entend nous l’imposer !
Cela veut dire réaffirmer notre conviction partagée qu’à terme il faudra envisager de rationaliser le fonctionnement de nos institutions en imaginant une collectivité unique rassemblant les compétences de la région et du département et dotée de pouvoirs renforcés.
Cela veut dire qu’en attendant la maturation des consciences, et pour contourner le risque imminent de nous voir imposer une réforme dont nous ne voulons pas, il nous faut faire le choix responsable et lucide d’une assemblée unique qui permette l’adaptation de la réforme territoriale prévue au plan national.
C’est cela à mes yeux chers camarades le chemin du possible !
C’est affirmer l’adaptation de la réforme territoriale comme une étape avant l’érection d’une collectivité unique adossée à un véritable projet de société élaboré par les guadeloupéens, pour les guadeloupéens.
C’est faire le choix d’un mode de scrutin qui garantisse à la fois la représentation du territoire et des courants de pensée, avec un dosage équilibré entre scrutin uninominal et proportionnel,
C’est faire le choix d’une organisation institutionnelle qui préserve l’équilibre de pouvoirs qui ne doivent pas être concentrés entre les mains d’un seul homme,
C’est surtout continuer d’avancer, à pas cadencés, mais à pas assurés, vers plus de cohérence et d’efficacité de nos politiques publiques en accord avec les choix manifestés par le peuple guadeloupéen.
C’est cela mes chers camarades la voie du possible !
C’est ce choix résolu de préserver l’avenir en créant les conditions de l’unité, dans le respect de nos convictions, pour servir le pays.
C’est le sens profond de l’intitulé même de notre parti : Guadeloupe Unie Socialisme et Réalités.
C’est l’engagement collectif auquel l’Histoire nous convoque ce matin.
Je vous remercie de votre attention.