La Guadeloupe rend hommage à Patrick Saint-Eloi
Combien étaient-ils, hier soir, sur la petite savane à l’entrée du Moule, où se tenait la veillée mortuaire de Patrick Saint-Eloi ? Des dizaines de milliers. Venus de toute la Guadeloupe
rendre hommage au Roi du Zouk Love... comme à Damencourt, il y a deux ans.
Aujourd’hui, à partir de 15 heures, une cérémonie funéraire aura lieu sur le même site, avant une bénédiction du corps et l’inhumation au cimetière communal.
Un cri dans la nuit. Des hurlements de douleur. « Non, non ! », crie la foule qui, en voyant apparaître le cercueil porté à dos d’hommes, ne peut retenir ses larmes. La réalité de
la mort de Patrick Saint-Eloi est là, dans ce petit cercueil étroit qui traverse lentement ce monde amassé derrière des barrières. Jusqu’à une estrade qui fait face à cette foule émue jusqu’aux
larmes.
Avant 19 heures, le moment où est apparu le cortège funèbre, sur la savane où se dresse le buste de Louis Delgrès, c’était le son des chansons de Patrick Saint-Eloi qui rythmait le tempo. Un
podium, qui accueillera plus tard des musiciens, un barriérage, une petite estrade, sous une toile de tente. Pas plus dun millier de personnes, en blanc ou en noir, certains en noir et blanc. Un
écran géant diffusait les clips les plus connus du chanteur. Certains avaient passé la nuit là, d’autre y étaient venus dès le petit matin. Pour ne pas manquer l’hommage au plus grand chanteur
que la Guadeloupe ait connu.
Pas de chagrin encore, un peu de mélancolie… Quelques rires, mêmes au gré des rencontres.
Une masse innombrable
La petite foule, grossit lentement pour devenir marée humaine.
Et puis, l’arrivée de personnalités, Victorin Lurel, Gabrielle Louis-Carabin, Marie-Luce Penchard, d’autres encore, des élus, des musiciens, des chanteurs, des écrivains, tout le monde culturel
était là. La tombée de la nuit, l’agitation des forces de l’ordre, a changé l’ambiance. Ceux qui riaient se sont soudainement tus au moment de l’annonce puis du passage du cortège, le corbillard
suivi d’un minicar où la famille avait pris place. Un court silence de stupeur et puis des hurlements, des chants, lancinants.
Tandis que le convoi s’arrêtait à l’entrée de la savane, les Guadeloupéens ont entamé leur long défilé. Toute la nuit ils sont passés devant le cercueil de Patrick Saint-Eloi, tandis que les
témoignages se succédaient au micro.
Entourés des élus, Marie-Luce Penchard et le préfet Jean Fabre, se sont approchés du cercueil, pour s'incliner.
Emotion intense, celle du groupe Kassav, entourant le cercueil. Des larmes écrasées, des têtes levées vers le ciel, baissées vers le sol, les mains caressant lentement le bois rouge du
cercueil.
La foule silencieuse, respectant cette communion autour de celui qui a été quinze ans compositeur, parolier, chanteur vedette de Kassav.
Fendant la nuit, des centaines de musiciens, connus ou anonymes, vêtus de blanc, s'engageaient dans la foule descendue de bus venus de Basse-Terre, Capesterre, Bouillante. D'ailleurs. de partout.
Un va-et-vient incessant sur le boulevard du bord de mer envahi de kaz a bokits sur roues.
A 20 h 45, le groupe Mas ka klé a interprété un chant plein d'émotion : « Patwik ou ka voyajé », repris par la foule. Un court intermède de chansons de PSE avant le groupe Vim du Moule.
Toute la nuit, ils ont joué pour Patrick. Sur le podium mais aussi, des tanbouyés, sur la pelouse, dans les rues adjacentes. Toute la nuit et encore aujourd’hui. Avant qu’à 15 heures, le cercueil
traverse la foule pour des obsèques religieuses.
André-Jean VIDAL