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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 21:34
Patrick Karam appelle le MEDEF à verser unilatéralement la prime de vie chère


Après 40 jours d'une crise aux conséquences sociales lourdes, Patrick Karam, délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer, prenant acte de la bonne volonté affichée par toutes les parties, demande au MEDEF et au patronat local de verser unilatéralement la prime de vie chère calculée sur une base annuelle pour répondre aux revendications salariales.

Cinq organisations patronales minoritaires ont signé un accord régional interprofessionnel sur les salaires en Guadeloupe, dit « Accord Jacques Bino », qui prévoit une prime de vie chère (50 euros pour les salaires inférieurs à 1,4 SMIC pour les entreprises de 0 à 100 salariés et pour les entreprises de plus de 100 salariés : 100 euros) assortie de modalités que rejettent le MEDEF et les organisations patronales, notamment le préambule politique et la base de calcul qui ne prend pas en compte tous les éléments de salaires.

Puisque le président du MEDEF, Willy Angèle, s'est déclaré à plusieurs reprises partisan d'appliquer l'augmentation voulue, Patrick Karam ne doute pas que le MEDEF local et l'ensemble des organisations professionnelles qui n'ont pas signé « l'accord Bino » prendront dans les jours qui viennent les dispositions pour appliquer unilatéralement les bonus de vie chère qu'ils ont établis dans leur propre proposition d'accord interprofessionnel (jusqu'à 1,4 SMIC : 50 euros pour les entreprises inférieures à 20 salariés ; 70 euros de 20 à 100 salariés ; 90 euros pour les plus de 100 salariés ; sauf dans certains secteurs exposés où la prime est de 50 euros ).

 
Cet engagement, qui est de l'intérêt même des entreprises comme des salariés, devrait permettre une sortie de crise honorable.

Il devient désormais urgent de mettre un terme à une situation intenable pour tous les Guadeloupéens.

Cette grève n'a que trop duré. Il est temps de sauver les TPE et les PME tenues par les guadeloupéens, dont le dépôt de bilan ne profiterait qu'aux multinationales et aux oligopoles. Il est encore temps de sauver les salariés de ces entreprises qui par milliers risquent leurs emplois. Il faut aussi penser aux étudiants et aux élèves qui ne doivent pas perdre une année.
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 21:31
Bonjour,

La Guadeloupe est une terre lointaine pour certains d'entre vous.

J'adresse, à tous ceux qui veulent un peu mieux comprendre,
un article du Journal Le Monde qui rend bien compte de la situation,
ce qui n'a pas toujours été le cas dans la presse nationale.

Une petite réserve. Pour le Guadeloupéen créolophone que je suis,
qui vit en Guadeloupe et a donc vécu la révolte de la Guadeloupe, la
traduction proposée en fin d'article du refrain régulièrement entendu
au cours des manifestations "La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a
pa yo" ("La Guadeloupe c'est à nous, la Guadeloupe c'est pas à vous") -
est une mauvaise traduction littérale donnant lieu à une mauvaise
interprétation.

"La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa yo" veut dire : La Guadeloupe
nous appartient (ou est notre), la Guadeloupe n'est pas la leur.

En créole, "yo" veut dire "eux" ou "ils".

Dans le contexte de cette phrase et de la révolte de Janvier - Février 2009,
dirigée par un collectif d'associations et de syndicats de travailleurs qui s'est
donné le nom de LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon) - Union contre les abus
outranciers, "yo" désigne TOUS les profiteurs. Desquels bien entendu, on ne
peut exclure l'ethno classe des "békés" descendants d'esclavagistes, certains
affairistes "métropolitains" et tous ceux qui se comportent en Guadeloupe comme
dans un "Far West".

Contrairement à ce que beaucoup ont tenté de faire croire, avoir conscience de
la persistance d'une fracture ethnique dans ces pays de la Caraïbe (entretenue par
certains groupes pour asseoir leur domination) et dénoncer cet état de fait, ne fait
pas de vous un raciste.

Salutations de Guadeloupe,

Jocelyn Valton
Critique d'Art - AICA
Profil facebook

Gwadloup an Kè an Nou

 Repère
Les raisons du malaise en outre-mer
Le Monde.fr LEMONDE.FR | 27.02.09 | 19h34  •  Mis à jour le 28.02.09 | 12h58

 [-] fermer "Présentation"
Les départements d'outre-mer (DOM) s'embrasent. Après la Guyane, qui protestait en novembre contre
le coût de l'essence, la Guadeloupe est bloquée depuis fin janvier par les grèves, tout comme la
Martinique, entrée dans la danse en février. Les DOM figurent parmi les territoires les plus pauvres de
l'Union européenne. Mais derrière les revendications économiques des manifestants apparaissent les
blessures d'un passé tumultueux. En théorie, les DOM sont des départements – presque – comme les
autres. Mais leur histoire douloureuse et les vestiges du colonialisme toujours présents dans leur société
sont mal connus en métropole.
 [-] fermer "Un lourd héritage historique"
Le poids de l'esclavage
Les sociétés ultramarines restent profondément marquées par l'empreinte de l'esclavage, qui a permis
aux sociétés coloniales de prospérer sur la très lucrative culture de la canne à sucre. Au total, quatre
millions de personnes ont connu l'état de servitude dans les colonies françaises. L'esclavage a été aboli
deux fois : une première fois en 1794, avant d'être rétabli huit ans plus tard par Napoléon Bonaparte,
puis le 27 avril 1848, par la IIe République – définitivement cette fois-ci. Paris a toutefois fait le choix de
perpétuer les fondations du système esclavagiste, maintenant des relations commerciales "exclusives"
entre les colonies et la métropole et en décourageant l'autosuffisance alimentaire à travers le soutien à la
monoculture sucrière. Et pour pallier le besoin de main-d'œuvre au lendemain de l'abolition de
l'esclavage, la France a fait venir des travailleurs "contractuels" d'Inde ou d'Afrique, créant de nouvelles
formes de subordination.
Une émancipation inachevée
En 1946, les Antilles accèdent au rang de départements. Toutefois, l'"assimilation" politique engagée par
le biais de la départementalisation ne s'accompagna pas d'une véritable émancipation économique et
sociale. Ce qui fait dire à Aimé Césaire, en 1971, dans Le Monde, que "la départementalisation, [qui]
devait être l'égalité des droits, ne le fut pas. Le nouveau système est devenu encore plus colonialiste que
l'ancien. Peu à peu, il a sécrété ses privilégiés : ceux qui vivent de lui, les fonctionnaires, les grosses
sociétés, le 'lobby' antillais qui pèse sur le pouvoir". Dans la foulée de la publication des Damnés de la
terre, en 1961, par le psychiatre martiniquais Frantz Fanon, les revendications indépendantistes se font
vives dans les DOM. Celles-ci sont attisées par l'émancipation, en 1962, des Antilles britanniques
vives dans les DOM. Celles-ci sont attisées par l'émancipation, en 1962, des Antilles britanniques
voisines (Jamaïque et Trinité-et-Tobago). Le "mon Dieu, que vous êtes Français", lancé par Charles de
Gaulle à la foule martiniquaise, à Fort-de-France en 1964, n'y fait rien : les années 1960 et 1970 sont
marquées par l'instabilité sociale. En mai 1967, de violentes émeutes et leur répression policière
ensanglantent Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, faisant officiellement sept morts (aujourd'hui, on parle de
87 de morts), tandis qu'en mars 1971, de violentes échauffourées éclatent à Basse-Terre, après trois mois
de grève générale. La métropole éteint les braises, mais ne résout pas les problèmes de fond.
 [-] fermer "Une économie sinistrée"
Coût de la vie
Difficile d'évaluer précisément l'écart de prix entre les territoires d'outre-mer et la métropole. Les études
à ce sujet font cruellement défaut, l'Insee ne disposant d'aucune statistique sur ce point. Tout juste sait-
on que l'inflation a été plus forte dans les DOM qu'en métropole, atteignant notamment 2,4 % en 2007
en Martinique, contre 1,5 %, en France métropolitaine. L'Etat tient compte en tout cas de la "vie chère"
dans les DOM, puisque les fonctionnaires qui y sont mutés disposent d'une prime augmentant leur
salaire de 40 %.
La fiscalité particulière de ces territoires rend certains produits, notamment ceux importés de métropole,
particulièrement onéreux. Les DOM ne font pas partie du territoire fiscal de la France et sont considérés
comme des territoires d'exportation par la métropole et l'UE. Les produits importés sont ainsi soumis à
une taxe d'"octroi de mer" fixée par les conseils généraux, en fonction de la catégorie de produit. Pour
les produits cosmétiques, par exemple, cette taxe représente 30 % du montant TTC. L'octroi de mer est
censé protéger les entreprises locales en surtaxant tout ce qui vient d'ailleurs, mais il fait grimper
vertigineusement les prix des produits d'importations, déjà soumis à des frais d'embarquement, de
débarquement et de fret maritime.
Une production peu diversifiée
Durant des siècles, Paris a découragé la diversification économique de ses colonies, ne favorisant que la
culture de la canne à sucre. Aujourd'hui encore, l'agriculture constitue l'essentiel de l'activité économique
des DOM, comme le relevait le sénateur Roland de Luart dans son rapport de 2003 sur le projet de loi de
programme pour l'outre-mer. "Les productions sont très spécialisées, notamment la banane, le rhum et
le sucre, et tournées vers l'exportation." Avec le tourisme, l'autre principale source de revenus dans les
Antilles, l'économie antillaise repose sur des activités fortement soumises aux aléas climatiques et très
dépendantes des relations avec la métropole.
Par ailleurs, l'économie des DOM repose largement sur le secteur public, qui y emploie un nombre
d'agents très important. La proportion de la fonction publique au sein de la population active est ainsi de
37 % en Martinique et 40 % en Guyane, contre 26,3 % en métropole, selon les chiffres de l'Insee.
Autres fragilités : l'étroitesse des marchés locaux et les difficultés de financement des entreprises, les
banques étant réticentes à financer des entreprises situées dans des territoires où le risque est perçu
comme plus important. Le point positif des économies ultramarines reste toutefois le dynamisme de sa
population, et ce malgré un niveau de formation inférieur à celui constaté en métropole. Les DOM
population, et ce malgré un niveau de formation inférieur à celui constaté en métropole. Les DOM
compensent cette faiblesse par une population plus jeune en moyenne qu'en métropole. Le taux de
création d'entreprise est ainsi relativement élevé – de 18,2 % par exemple à la Réunion, pour une
moyenne nationale de 11,1 %.
Les aides de la métropole
Les mesures fiscales mises en place par l'Etat, censées accélérer le développement de l'économie locale,
ont en réalité surtout contribué à enrichir quelques grosses fortunes locales, creusant les inégalités. La
vingtaine de dispositifs fiscaux – qui représentent un coût de 3,3 milliards d'euros au budget 2009 –
n'ont guère fait la preuve de leur efficacité, quand ils ne produisent pas d'effets pervers. Ainsi le coût de
la défiscalisation en matière de logement n'a cessé de croître (230 millions d'euros en 2008, soit + 27 %
en deux ans), avec pour effet pervers de mettre en panne la construction de logements sociaux au profit
du logement libre et de renchérir les prix des terrains.
Au total, l'effort global de l'Etat en faveur de l'outre-mer se monte à 16,7 milliards d'euros en 2009. Près
de 4 milliards de plus sont programmés pour la période 2007-2013 dans le cadre de la "politique de
cohésion" de l'Union européenne. Avec un produit intérieur brut (PIB) inférieur à 75 % de la moyenne
européenne (67,3 % pour la Guadeloupe), les départements d'outre-mer peuvent bénéficier de mesures
dérogatoires. Mais pour de nombreux élus locaux, le maintien sous perfusion des économies
ultramarines est loin de répondre à l'urgence sociale de ces territoires.
Une situation sociale explosive
On comptait 22,7 % de chômeurs en Guadeloupe en 2007, 21,2 % en Martinique, 24,2 % à la Réunion,
contre 8,5 % pour l'ensemble de la France selon les données de l'Insee. Mais surtout, le chômage de
longue durée y est très prégnant. Ainsi, plus de la moitié des sans-emploi guadeloupéens le sont depuis
plus de trois ans. La proportion de RMistes est elle aussi alarmante (19,4 % par exemple en Guyane,
contre 3,4 % en métropole). Dans son rapport sur l'outre-mer, le sénateur Du Luart note ainsi que les
forts taux de chômage en outre-mer s'expliquent par le décalage entre une croissance économique plus
importante qu'en métropole et une évolution démographique encore plus forte – en un siècle, la
population ultramarine est passée de moins de 600 000 personnes à plus de 2,4 millions aujourd'hui.
Au-delà de ces statistiques, le mouvement de protestation qui secoue les Antilles signale surtout le ras-
le-bol de la population face à une structure sociale héritée du colonialisme, basée sur la "pwofitasyon",
dans laquelle la richesse est concentrée entre les mains de quelques grandes familles de "békés". Pour
Christiane Taubira, députée divers-gauche de Guyane, la situation dans les DOM "frôle l'apartheid
social".
 [-] fermer "La question du statut politique"
Depuis le début des manifestations en Guadeloupe, le collectif LKP évite d'évoquer la question du statut
de l'île et son maintien dans la République. Pourtant, malgré la révision constitutionnelle de 2003 – qui
avait notamment entériné la suppression des TOM (territoires d'outre-mer) au profit de "collectivités
territoriales" fixant elles-mêmes leurs règles de gouvernement –, la question du lien avec l'Etat reste
posée. Les quatre DOM – Martinique, Guyane, Guadeloupe et Réunion – sont gérés par un conseil
général et un conseil régional, dont les compétences sont identiques à celles des structures de la
métropole. Mais en raison de la faiblesse de leurs ressources propres, notamment fiscales, ces
collectivités présentent une dépendance accrue à l'égard de l'Etat.
En décembre 2003, la Guadeloupe a rejeté par référendum à près de 73 % la création d'une collectivité
unique se substituant à la région et au département. A l'époque, ce vote avait été interprété comme un
attachement au statut de DOM et à la France, et donc comme la fin de la tentation indépendantiste. La
Martinique avait elle aussi rejeté cette possibilité à une courte majorité (50,48 %). Depuis cette date, le
débat sur l'évolution du statut et la responsabilité locale a été enterré. Or, plusieurs analystes relèvent
que dans la crise actuelle, l'un des points-clés est le problème de la domiciliation de la décision politique.
Ainsi, le mouvement LKP exprime une quête identitaire qui ne peut se réduire aux revendications
sociales. Le slogan "La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa ta yo" ("La Guadeloupe, c'est à nous ;
la Guadeloupe, c'est pas à vous"), qui rythme les cortèges depuis le début du conflit, marque cette
émergence identitaire. En annonçant, le 19 février, la convocation d'"Etats généraux de l'outre-mer",
Nicolas Sarkozy semble avoir entendu ce besoin de réétudier le lien entre la République et ses DOM.
Reste à savoir quelles propositions sortiront concrètement de ces Etats généraux.
 
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 21:30
Résumé du livre "La subversion" de Roger Mucchielli !
A méditer et à faire circuler...

Les agents subversifs agissent sur l'opinion publique par la maîtrise d'un canal de communication majeur (télé, radio, journal...) ; sans canal de communication majeur, pas desubversion.

La méthode :

- Discréditer les notables ; stigmatiser leurs comportements, leurs opinions, préjudiciables au plus grand nombre. (les"profiteurs").

- Démoraliser la population ; la convaincre de son impuissance à agir, la culpabiliser, la faire douter.

- Diviser ; empêcher un consensus propice à une réaction de masse.

- Discréditer l'autorité ; démontrer son incapacité à prendre en charge les problèmes, à assurer la sécurité publique, encourager la désobéissance civique, faire germer une autorité de substitution.

- Neutraliser toute intervention spontanée des masses en faveur de l'ordre établi (grève de l'essence) ; inhiber les masses. Il n'est même pas besoin de solliciter l'assentiment des masses. Il faut obtenir l'apathie populaire.

- Mais pourtant : "parler et agir au nom du peuple".

- Isoler les citoyens, les obliger à ne penser qu'à eux, les recentrer sur leurs besoins vitaux à court terme (fermer les commerces d'alimentation, bloquer l'accès aux soins...) : c'est la "panique muette".

- Pendant ce temps, l'agent subversif dénonce, critique, mais ne propose rien ; il n'est pas suspect ; il conserve toute latitude pour s'indigner (la vie est trop chère... certains font des sur-profits...).

- La violence s'installe ; elle est présentée comme "des actes désespérés de personnes qui n'en peuvent plus" ; on en vient à évoquer la "légitime défense" (les jeunes qui cassent à Fort de France sont des victimes de la société).

- Le manichéisme moral est mis en place ; il y a le bien et le mal.

- Le pouvoir sous toutes ses formes, c'est le "mal" (l'Etat, les capitalistes, les profiteurs...).

- A l'opposé, les éléments subversifs se font porteurs du "bien", sous toutes ses formes les moins contestables (respect de l'être humain...).

- La violence, le meurtre deviennent "légitimes" ; la cause est "juste".

- La masse est déstabilisée, culpabilisée, sa conscience morale la fait douter.

- Sans contre-subversion, la masse s'inhibe.

- Les "belle âmes" changent de camp... par faiblesse, par intérêt.

- Les belles âmes sont récupérées par les éléments subversifs ; elles deviennent leur caution.

- Il devient "confortable" de rallier la subversion.

- "Les événements" deviennent le prétexte à "régler des comptes personnels", la terreur s'installe.

- Les éléments subversifs font pression sur les responsables des médias (certains se reconnaîtront...).

- Les médias sont aux ordres des éléments subversifs ; ils relaient les exactions, ils alimentent la panique muette, ils emballent le mouvement.

- Plus rien n'empêche le prise du pouvoir par la minorité subversive...

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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 21:29

Edition du monde du 28-02-09
Objet : Texte de D Maximin


Daniel Maximin : "La France a peur d'affirmer sa richesse métisse"
LE MONDE | 27.02.09 | 13h59 • Mis à jour le 27.02.09 | 13h59

aniel Maximin a été directeur régional des affaires culturelles en Guadeloupe de 1989 à 1997. Poète, romancier, essayiste, il a notamment écrit /Les Fruits du cyclone, une géopolitique de la Caraïbe /(Seuil), et vient de publier /L'Invention des désirade/s (Points-Poésie.)

*Que cachent vraiment ces manifestations et revendications en Guadeloupe et maintenant en Martinique ?*


Cette puissante mobilisation populaire face aux injustices socio-économiques dépasse les stratégies syndicales, les tactiques politiques. Le slogan en créole, /"La Gwadloup sè tan nou/", ne signifie pas une clôture insulaire frileuse, mais l'évidence du souhait, rêve ou réalité à édifier, d'un recentrement, d'une réappropriation collective bien enracinée. Les Antilles ne sont ni poussières d'empire ni porte-avions ultra-périphériques des centres du monde. Les élites et les pouvoirs n'ont souvent offert aux Antillais que des stratégies victimaires, des diversions racialistes, et des remèdes à court terme.

*Mais les Antilles n'ont-elles pas bénéficié, économiquement, de certains privilèges, d'assistance, de subventions ?*

Précisément. Economiquement, la puissance de la mobilisation impose de dépasser les solutions précédentes qui renforçaient une économie d'assistance à court terme, la surexploitation des terres, l'exclusif de la monoculture, et l'esclavage moderne de la surconsommation, au profit d'un développement économique autocentré. Géopolitiquement, la mobilisation et la réflexion actuelles imposent de sortir de la prison ou du refuge de l'insularité au profit d'une conscience d'archipel ouverte sur l'environnement caraïbe. Donc une meilleure coopération régionale. Par exemple une meilleure entente avec des pays qu'il ne faut pas considérer seulement comme des concurrents économiques mais comme des alliés politiques. Et une présence accrue au sein de l'Organisation des Etats de la Caraïbe.

*Y a-t-il aussi un problème institutionnel ?*

Oui. Institutionnellement, il faut enfin achever le mouvement initié depuis la participation des Antilles à la Révolution de 1789 et jusqu'à la Résistance en 1939-1945. A savoir un processus historiquement inédit de "décolonisation au sein de la République". Au fond, cela rejoint les questions du pouvoir des régions au sein de la métropole. La citoyenneté commune à la métropole et aux Antilles ne doit pas se faire sur l'exclusion des identités sociales et culturelles. On peut être égaux sans être semblables.

*L'élection de Barack Obama à la présidence des Etats-Unis a-t-elle joué dans le déclenchement de ce conflit ? *

Indirectement. Le choix du 20 janvier voulait symboliquement initier la lutte un jour de victoire. A mille lieues de la plainte et du ressentiment. L'intronisation d'Obama symbolisait la fierté des Noirs de toutes les Amériques d'avoir résisté au racisme et à l'exploitation en imposant à chacun de reconnaître la primauté de la chair humaine sur la couleur de peau. Il ne faut pas mésestimer non plus la portée des obsèques nationales de Césaire, révélant aux yeux du monde /"un peuple debout et libre, à la boussole et à la barre"/, comme il l'avait prophétisé dès 1939. Cette dimension de force, d'assurance, de justesse, de dignité affirmée, a orienté dès l'origine le cours de la mobilisation.

Mais je voudrais préciser que, pour moi, la victoire d'Obama n'est pas d'abord la victoire d'un Noir, mais celle d'un homme politique américain, démocrate. Son expérience, son charisme et son programme l'ont fait élire très logiquement après les désastres des années Bush par une majorité du peuple américain, toutes couleurs confondues. Un père noir africain et une mère blanche ont enfanté un Américain, c'est-à-dire un fruit issu de plusieurs racines, une synthèse de trois ou quatre continents.

Je vois Obama comme l'enfant de ce tissage de résistances, plus que comme celui d'un simple métissage biologique familial. Les grandes figures du combat des Noirs, que ce soit Rosa Parks, Martin Luther King ou Césaire, n'ont pas lutté pour obtenir "plus" pour les seuls Noirs, ils n'ont pas porté une revendication raciale ou communautariste, ils ont combattu pour le dépassement des couleurs de circonstance et du masque des peaux, dans les autobus comme dans les cerveaux.

*Ne trouvez-vous pas assez hypocrite, cette "obamania" mondiale, et singulièrement française ?*

Non, car le réel se nourrit du symbolique. A l'extérieur des Etats-Unis, on peut y voir un symbole de la dimension métisse du monde entier, le rêve possible d'une cohabitation des identités plurielles assumées, après le siècle des nationalismes, des guerres mondiales et à l'aube de la mondialisation. C'est la raison de l'"obamania" africaine par exemple, plus forte au sein des peuples que dans les élites au pouvoir : un fils d'Africain élu démocratiquement chef d'Etat américain peut donner l'exemple d'un dépassement des assignations ethniques, qui sont souvent le masque des oppressions politiques et des asservissements économiques.

Quant à la France, c'est un cas très particulier de cousinage. L'"obamania" française est le retour, parfois inconscient, de ce qui circule depuis plus d'un siècle entre les deux pays. Au XIXe siècle, la bourgeoisie noire du Sud, émergée après l'abolition, voulait envoyer ses enfants étudier à Paris, en leur demandant fièrement d'aller saluer Alexandre Dumas /"le plus célèbre écrivain français, petit-fils d'esclave haïtienne, et fils d'un grand général noir de la Révolution"/. Plus tard, les poètes noirs américains de la Harlem Renaissance des années 1920, fuyant la ségrégation, sont venus aussi à Paris et y ont rencontré les jeunes étudiants Césaire, Damas, Senghor et Alioune Diop, pionniers culturels francophones de la décolonisation des peuples et des esprits.

Mais il y a quelque chose de très singulier avec la France, c'est qu'elle craint d'affirmer la richesse métisse de son modèle de citoyenneté, qui fait justement son attrait à l'extérieur. Et le grand refoulé du discours idéologique français de "pureté nationale", c'est que ce pays, qui est à la fois un métissage du Nord romantique et de la Méditerranée classique, de l'ouverture à l'Est et de la vocation atlantique, représente en son for intérieur la dimension de créolisation des composantes de l'Europe elle-même. Les Français l'ont portée en Amérique jusqu'à même inventer avec les Africains une langue neuve : le créole.

*L'absence d'une communauté noire en France n'est-elle pas due au manque d'entente entre Antillais et Africains ? *

La culture antillaise est le meilleur rempart contre le communautarisme. Je ne crois pas à ces conflits ou ces amours de groupes. Le communautarisme réduit les communautés à leur plus petit commun diviseur. La communauté noire n'existe pas, ni en France, ni en Afrique, ni ailleurs, pas plus que la communauté blanche, ou jaune. Et cela n'empêche pas les solidarités. Le communautarisme est à l'égal du racisme, un crime contre l'humanité des communautés, celui, par exemple, qui a nourri au XX^e siècle tant de massacres entre cousins de même couleur, du nazisme au Biafra, du Cambodge au Rwanda.

L'humanité des individus ne tient pas à leur couleur de nature, mais à la richesse spécifique de leurs histoires et de leurs cultures. C'est le regard de l'autre qui crée la confusion des couleurs. Et aucune communauté n'est à l'abri de la haine ou de l'amour d'une autre. La peau est un masque, qui nous met tous en face du défi de l'altérité, parce que aussi c'est le seul masque qu'on ne peut heureusement pas enlever.


*Propos recueillis par Josyane Savigneau*
Article paru dans l'édition du 28.02.09
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 20:57
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www.le-hamac.com/creole.htm

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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 20:39
 GUADELOUPE

Je reconnais mon île et qui n’a pas bougé.
Voici les trois îlots, et voici la grande Anse.
Voici, derrière le Fort les banbandes (1) rouillées
Je suis comme l’anguille flairant les vents salés
Et qui tâte le pouls des courants.

Salut, île ! C’est moi. Voici ton enfant qui revient.
Par-delà la ligne blanche des brisants,
Et plus loin que les vagues aux paupières de feu,
Je reconnais ton corps brûlé par les embruns.

J’ai souvent évoqué la douceur de tes plages
Tandis que sous mes pas
Crissait le sable du désert
Et tous les fleuves du Sahel ne me sont rien
Auprès de l’étang frais où je lave ma peine.

Salut, terre mâtée, terre démâtée !
Ce n’est pas le limon que l’on cultive ici
Ni les fécondes alluvions.
C’est un sol sec, que mon sang même
N’a pu attendrir,
Et qui geint sous le soc comme femme éventrée.

Le salaire de l’homme ici
Ce n’est pas cet argent, qui tinte clair un soir de paye
C’est le soir qui flotte incertain au sommet des cannes
Saoules de sucre
Car rien n’a changé.
Les mouches sont toujours lourdes de vesou (2)
Et l’air chargé de sueur.

Guy TYROLIEN, Balles d’or, Présence Africaine
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 19:53
Un millier de personnes manifestent devant Destreland

Un millier de personnes, réunies à l'appel du collectif guadeloupéen LKP, ont manifesté dans le calme lundi devant les portes closes de Destreland, à Baie-Mahault.
Avant de se rendre à pied à Jarry en passant par Moudong et le carrefour de la Voie verte.

« L'idée c'est que nous contraignions (les propriétaires) à signer l'accord » sur l'augmentation de 200 euros des salaires, rejeté par les organisations patronales majoritaires dont le Medef, a expliqué Charlie Lendo, secrétaire général adjoint de l'UGTG, en tête de cortège.
« Nous avançons tranquillement, a souligné le responsable. Il n'est pas question qu'il y ait des actions intempestives ».
Les manifestants se sont dispersés dans le calme vers 12 h 30, après plus de trois heures de manifestation. Aucun incident n'a émaillé le rassemblement.
Encadrés par le service d'ordre du LKP, ils ont coupé la voie rapide, bloquée à la circulation, et emprunté dans le calme la rampe menant au parking du centre commercial propriété du groupe Hayot, qui compte 180 boutiques, dont un hypermarché Carrefour.
Sur le parking désert, une demi-douzaine de gendarmes mobiles observaient leur progression.
Arrivés aux portes de l'hypermarché, protégées par deux fourgons de gendarmes mobiles, les manifestants se sont regroupés en carré, et ont écouté les responsables syndicaux qui prenaient la parole les uns après les autres.
« On va faire appel au patron », une grande fortune de l'île, symbole de ceux qu'on appelle ici les profiteurs, a expliqué Max Céleste, dirigeant de Combat ouvrier (Lutte ouvrière), membre du LKP. Il a toutefois précisé qu'il avait peu d'espoir de le rencontrer:  « Ce sont des gens qu'on appelle les sans-visage ».
« Même s'il ne signe pas aujourd'hui, les travailleurs se chargeront de faire signer l'accord de gré ou de force », a-t-il précisé.
Plus tard, les mêmes ont été à pied de Destreland à Jarry en passant par Moudong et le  carrefour de la Voie verte.
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 19:52
« L'accord est prêt. Il faut savoir finir une grève »

Le document contenant l'accord social intervenu en Guadeloupe est prêt à être communiqué au LKP, a assuré lundi le préfet Nicolas Desforges en invitant de nouveau le collectif à mettre fin à la grève.
« Ce document est prêt et est actuellement soumis aux Conseils régional et général, qui sont appelés à co-financer la hausse des bas salaires », a dit M. Desforges.
Le texte, a-t-il expliqué, « est en train d'être examiné par ces deux collectivités. Dès que tous les feux verts auront été donnés, il sera communiqué à M. Domota », le leader du LKP.
« Nous étions convenus que ce pourrait être aujourd'hui (lundi). Si ce n'est pas aujourd'hui, il faut que ce soit demain » mardi, a-t-il également affirmé.
« Il faut savoir finir une grève », a lancé le préfet, tout en jugeant « pas anormal qu'il y ait encore quelques soubresauts ».
Le préfet a enfin redit son opposition aux visites que le LKP compte rendre aux entreprises pour leur faire signer l'accord.  « La contrainte ne fait pas partie des modalités d'extension retenues », a-t-il souligné, et  « toute adhésion qui serait forcée serait de nul effet ».
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 19:45
Délais de paiement fiscaux pour la Martinique et la Guadeloupe

Les entreprises et les particuliers de la Guadeloupe et de la Martinique pourront bénéficier de délais de paiement pour leurs impôts, a annoncé lundi le ministre du Budget, Eric Woerth.
« Pour venir en aide aux entreprises et aux ménages confrontés à des difficultés liées au mouvement social qui bloque l'activité économique en Guadeloupe et en Martinique depuis plusieurs semaines », le ministre « a souhaité que les entreprises et les professionnels (commerçants, artisans...) déposent leurs déclarations fiscales aux dates d'échéance prévues, qu'elles soient ou non accompagnées du paiement de l'impôt correspondant », explique Bercy dans un communiqué.
M. Woerth a donc demandé aux services de la direction générale des finances publiques  « d'examiner avec une bienveillance particulière les demandes de délais de paiement et de remise gracieuse de majorations ou des pénalités de retard, sollicitées par les entreprises et les professionnels ».
Le ministre a également accordé un délai supplémentaires aux contribuables concernant le premier acompte 2009 d'impôt sur le revenu: la date limite de paiement de l'acompte est reportée au 15 avril 2009, sans application de la pénalité de 10%.
« Pour les cotisations de taxe d'habitation, de taxe foncière, d'impôt sur le revenu 2008 et de contributions sociales mises en recouvrement au 31 décembre 2008, et dont les dates limites de paiement sont fixées en février ou en mars 2009, un report de la date d'échéance de 30 jours pour chacune de ces impositions est accordé, sans application de la pénalité de 10% » , précise le communiqué.
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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 19:42
Guadeloupe et Martinique risquent de connaître une fin de conflit tendue

Pointe-à-Pitre, Fort-de-France, envoyés spéciaux

La Guadeloupe et la Martinique vont-elles signer en même temps, lundi 2 mars, l'accord qui mettra fin à leur mouvement social ? En Martinique, après vingt-cinq jours de grève générale, le Collectif du 5 février 2009 a annoncé, dimanche, qu'il acceptait la dernière proposition, formulée la nuit précédente par le patronat.

L'accord cadre devrait être finalisé et signé lundi. Il prévoit que chaque salarié percevant jusqu'à 1,4 fois le Smic bénéficiera d'une augmentation de 200 euros, financée par les entreprises, l'Etat, les collectivités locales – comme en Guadeloupe.

Samedi, vers trois heures du matin, le Medef et ses associés avaient proposé des augmentations importantes. La signature paraissait imminente. Mais la ligne dure réunie autour de Ghislaine Joachim-Arnaud, secrétaire générale de la CGT-Martinique (proche de Lutte ouvrière) l'emportait et réévaluait la revendication à 250 euros pour les salaires, les minima sociaux, les retraites…

Dimanche, les modérés ont repris l'avantage, s'appuyant sur une population pressée d'en finir. Toute la journée, le mouvement n'a cessé de se déliter. Les petits artisans, qui soutenaient massivement la grève, ont annoncé leur intention de reprendre leur activité. Une partie des camionneurs qui bloquaient le port levait les barrages. Des enseignants et des parents appelaient à la reprise de l'école. Des maires négociaient la réouverture partielle de leur administration.

Le président du conseil régional, l'indépendantiste Alfred Marie-Jeanne, signifiait également son agacement. Finalement, dimanche soir, Michel Monrose, président du Collectif, a repris les rênes et accepté l'accord-cadre.

REFUS DE DIRE "POUCE"

En Guadeloupe, à Pointe-à-Pitre, plusieurs milliers de personnes réunies devant le palais de la Mutualité ont décidé, dimanche soir, à main levée, la poursuite du mouvement. Tant que les dirigeants du LKP n'auront pas de papier officiel pour formaliser les dernières négociations sur le gel des loyers, les prix des produits de première nécessité, la baisse du prix de l'eau et de l'essence, ils refusent de dire "pouce". Ces revendications paraissent cependant acquises et le LKP se prononcera lundi après-midi dès réception de l'accord final.

En attendant, il prévoit de durcir le mouvement, lundi matin, en se rendant dans les entreprises, pour forcer les patrons non signataires à se conformer à l'accord du 27 février qui prévoit 200 euros d'augmentation pour les plus bas salaires.

A Paris, la ministre de l'intérieur, Michèle Alliot-Marie a réitéré son appel au Medef à avoir "lui aussi, une attitude responsable." "Cette grève a beaucoup duré. Aujourd'hui, elle porte atteinte à la liberté d'aller et de venir, de pouvoir travailler, de pouvoir s'approvisionner normalement, à la liberté des enfants d'aller à l'école. Tout cela doit s'arrêter", a-t-elle déclaré lors de l'émission Dimanche soir-politique.

Samedi, l'atmosphère s'était détériorée entre le LKP et le préfet, Nicolas Desforges. Peu avant 18 heures, celui-ci quittait la table des négociations, pour aller faire une conférence de presse, quasi en catimini. Le message était simple : "Je veux dire, au nom de l'Etat, que le retour à la vie normale, auquel les Guadeloupéens aspirent, s'impose désormais."

Mais Elie Domota, porte-parole du Collectif, et ses lieutenants considèrent que ce n'est pas au préfet de siffler la fin du mouvement social.

Béatrice Gurrey et Benoît Hopquin
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