ASSEMBLEE GENERALE DE LA FEDOM
Discours du ministre des Outre-mer
M. Victorin LUREL
Monsieur le président,
Mesdames et messieurs,
Je vous remercie de me permettre ce matin d’ouvrir
les travaux de votre assemblée générale et de
m’offrir ainsi l’occasion de m’exprimer devant vous
au nom du gouvernement.
La Fedom est l’un des acteurs importants de la vie
économique et sociale des outre-mer. Elle
représente, à nos yeux, des entreprises qui comptent
parmi les forces vives des territoires dont nous
avons la responsabilité. Et il est essentiel qu’avec
vous, comme avec d’autres, les échanges soient
nourris et, je le souhaite, féconds.
Le ministre que je suis appartient à un
gouvernement qui a érigé le dialogue et la
concertation en méthode de travail. Et je m’applique
à mettre cela en pratique dans l’ensemble des
actions que nous conduisons depuis le 16 mai.
Gouverner, c’est faire ce que l’on dit. Assurément.
Mais bien gouverner, c’est aussi dire ce que l’on va
faire. Et c’est, bien évidemment, tenir ses
engagements.
Je crois pouvoir dire ici, devant vous, que j’ai le
sentiment que notre démarche, de ce point de vue, a
été comprise. C’est pourquoi je tiens à vous
remercier d’emblée pour avoir joué le jeu depuis
bientôt six mois que le gouvernement est en place.
Nous avons discuté. Nous nous sommes écoutés.
Nous avons confronté nos points de vue. Nous avons
parfois fait évoluer nos positions. Certes, nous
n’avons pas toujours été d’accord. Mais, jamais, nous
n’avons cessé de dialoguer et d’avancer ensemble
vers une meilleure compréhension mutuelle.
Une preuve éclatante de la qualité de nos échanges,
c’est la tenue dans tous les territoires, ces derniers
jours, des conférences économiques et sociales.
Qualité d’échanges, d’abord, avec votre organisation,
car ces conférences rejoignent une préoccupation, et
– mieux encore – une proposition formulées par la
Fedom.
Qualité d’échanges, aussi, avec les acteurs de la vie
économique et sociale outre-mer, car les premiers
retours qui m’ont été faits sont tout à fait positifs. Ils
augurent de conclusions fructueuses qui seront
rendues lors d’une grande conférence économique et
sociale de synthèse qui se tiendra à Paris et à
laquelle j’inviterai le Premier ministre.
Ainsi, pourrons-nous ensemble, détailler encore
davantage la feuille de route qui est la nôtre pour
promouvoir le « développement solidaire » souhaité
pour les outre-mer par le président de la République.
Le dialogue et la concertation, nous les avons aussi
mis en pratique dans le processus d’élaboration du
projet de loi de régulation économique qui a été voté
sans opposition par le Sénat et par l’Assemblée
nationale. Aujourd’hui même, la commission mixte
paritaire se saisit du texte pour une adoption
définitive courant novembre et une promulgation
que nous souhaitons rapide.
Là encore, nous n’avons pas été forcément d’accord
sur tout. Il y a eu des critiques, parfois sévères. Un
peu trop sévères, parfois, d’ailleurs… Mais le
gouvernement a toujours été à l’écoute et je me suis
moi-même rendus dans tous les territoires dans un
esprit d’ouverture et pour faire oeuvre de pédagogie.
Ensemble, avec vous, avec d’autres organisations
patronales, mais aussi avec les organisations
syndicales, les associations de consommateurs et
avec l’ensemble des élus locaux, nous avons
contribué à grandement améliorer le texte.
Il est aujourd’hui le produit d’une intelligence
collective en laquelle je crois beaucoup et il est une
réponse cohérente et efficace pour répondre à la
problématique de la « vie chère » qui, chacun l’admet
enfin aujourd’hui, est un frein majeur au
développement de nos territoires.
Oui, la question du pouvoir est une hypothèque
lourde qui pèse sur la croissance de nos territoires.
La « vie chère », les écarts de prix anormaux
observés partout dans les outre-mer minent la
confiance entre les consommateurs et les
entreprises, mais aussi la confiance entre les
entreprises elles-mêmes.
Cette méfiance conduit les ménages à moins
consommer, à se réfugier pour certains dans
l’épargne de précaution, pour d’autres dans la spirale
de l’endettement, voire du surendettement qui
fragilisent encore davantage nos économies.
Elle alimente aussi des mécanismes
d’alourdissement des coûts salariaux. Ainsi, les
risques de boucles prix-salaires sont réels dans les
outre-mer et la vie chère en est la cause principale.
Et c’est vous, entreprises, qui en pâtissez à votre
tour.
La question de la vie chère se pose à l’ensemble des
agents économiques. Ménages comme entreprises.
Les prix élevés du carburant sont une charge pour
tous ! Et les marges des uns sont les coûts des autres.
Il fallait donc agir. Agir résolument. Et nous l’avons
fait.
La future loi de régulation économique crée les
conditions d’une plus grande et d’une meilleure
concurrence dans nos économies. Elle vise, oui, à
faire mieux fonctionner nos marchés et à y restaurer
la confiance entre les agents. Ni réglementation
tatillonne, ni économie administrée, il s’agir pour les
pouvoirs publics de définir un cadre au sein duquel
la négociation et la discussion sont privilégiées pour
obtenir, quand c’est nécessaire, des prix plus justes
et des marges plus raisonnables. Les sanctions et les
contraintes, car il faut bien des garde-fous, n’ont
vocation à être utilisées que si les objectifs ne sont
pas atteint par la discussion.
C’est pourquoi, je ne cesse de le répéter, cette loi
n’est pas un aboutissement, mais bien un
commencement. Et nous aurons besoin encore
d’entreprises fortes qui jouent le jeu à nos côtés pour
qu’une économie mieux régulée, plus ouverte, plus
transparente et plus soucieuse de l’intérêt des
consommateurs, soit davantage génératrice de
croissance et d’emplois.
Tel est en tout cas l’objectif que nous poursuivons.
Le projet de loi de finances pour 2013 s’inscrit lui
aussi dans cet objectif. Et, là encore, le président de
la République, le Premier ministre et le
gouvernement ont voulu, à travers les arbitrages qui
ont été rendus, adresser un message très fort et très
volontariste aux outre-mer.
Les crédits de la mission outre-mer figurent en effet
parmi les budgets les plus significativement en
hausse ce qui, dans le contexte actuel que vous
connaissez, témoigne de la priorité accordée à nos
territoires.
Nos crédits progressent en effet de 5 % en crédits de
paiement à 2 milliards d’euros, à périmètre
constant par rapport à 2012. Sur trois ans, cette
augmentation sera de plus de 12%.
Le programme « emploi outre-mer » (doté de près
de 1,4 milliard d’euros) augmente de près de 7 % en
AE et de plus de 4 % en CP.
Le programme « conditions de vie outre-mer »
augmente (hors effets de périmètre) de 0,6 % en AE
à 811 millions d’euros et de presque 7 % en CP à
(672 millions d’euros).
Cet effort intervient, je tiens à le rappeler, après
plusieurs années d’un recul régulier de l’effort de
l’Etat en faveur des outre-mer.
A travers ses quatre priorités affichées :
- pour le logement social – la LBU est remise à
niveau et passe de 214 à 227 millions d’euros…
engagement donné, parole tenue ;
- pour le redressement de la production et de la
croissance outre-mer – j’y reviendrai ;
- pour la jeunesse et l’insertion socioprofessionnelle
- et pour la bataille de l’emploi ;
… c’est un message de confiance que l’Etat – enfin de
retour dans nos territoires – entend diffuser.
Les entreprises, nous le savons, ont besoin de
visibilité et de lisibilité dans l’action gouvernementale. Et il faut reconnaître qu’elles n’ont
eu ni l’une, ni l’autre ces dernières années.
L’engagement du chef de l’Etat envers les outre-mer,
c’est précisément de mettre en oeuvre une politique
cohérente avec des dispositifs stabilisés et pérennes.
La politique d’allègement et d’exonérations de
charges des petites entreprises intervenant dans des
secteurs ou dans des zones prioritaires sera donc
dotée de moyens accrus, en hausse de 8%, à plus de
1,1 milliard d’euros en 2013. Près de 70.000
établissements bénéficieront de cette mesure qui
contribuera au maintien ou à la création d’emplois
en renforçant la compétitivité grâce à la réduction du
coût du travail qu’elle permet.
L’investissement public est au coeur de notre
stratégie, car il est un moyen essentiel de préparer
l’avenir des Outre-mer et de réunir les conditions
d’une croissance durable créatrice d’emplois. C’est
pourquoi, dès le budget 2013, 50 millions d’euros
seront mobilisables pour des projets améliorant les
conditions de vie des populations ultramarines dans
les domaines sanitaire, social, routier et
environnemental.
Cette enveloppe est la première concrétisation de la
promesse du Président de la République de «
dégager 500 millions d’euros pour l’investissement
outre-mer » sur le quinquennat.
Par ailleurs, les contrats de projets et de
développement de chaque territoire bénéficieront
d’un soutien important qui se traduit par
l’augmentation de près de 14% des crédits de
paiement en 2013. Et nous continuerons à bonifier
les prêts accordés par l’AFD aux collectivités
ultramarines. Cette dépense pouvant aller jusqu’à 30
millions d’euros doit permettre l’octroi d’un volume
de 350 millions d’euros de nouveaux crédits à
l’investissement.
Enfin, une déclinaison spécifique de la Banque
publique d’investissement (BPI) dans chaque
département et territoire d’outre-mer doit permettre
non seulement de garantir, comme le Président de la
République l’a souhaité, l’accès à l’ensemble des
prestations offertes dans l’Hexagone, mais aussi et
surtout l’apport de réponses adaptées et pertinentes
aux besoins des entrepreneurs qui souhaitent se
développer dans les outre-mer.
Je veillerai à ce que sa doctrine d’intervention soit
suffisamment souple et adaptable pour tenir
compte de la taille des entreprises car, dans nos
territoires, les TPE devront être le coeur de cible. Il
faudra tenir compte de leur sous-capitalisation
structurelle, de leurs difficultés d’accès au crédit et
de la difficulté à catalyser l’intervention des
établissements bancaires et les instruments
d’intervention devront faire l’objet d’une déclinaison
locale en garantissant l’adaptation aux besoins
propres à chaque territoire.
Dans le contexte actuel de crise, il ne faut pas
succomber à la morosité et, encore moins, au
renoncement. Il faut au contraire faire assaut
d’initiatives, de créativité, d’inventivité et, j’ose le
dire, d’enthousiasme.
Je vous exhorte donc – le mot n’est pas trop fort – à
entendre les signaux que le gouvernement vous
adresse. Nous sommes dans une urgence
mobilisatrice. Et nous voulons précisément mobiliser
tous les outils pour permettre aux entreprises de
créer des emplois.
Le maintien pour 2013 de nos dispositifs incitatifs à
l’investissement hors du plafonnement global des
niches fiscales est un autre signal que la situation
particulière de nos territoires a été prise en compte
au plus haut niveau de l’Etat. Là encore,
engagement donné, parole tenue.
Bien sûr, il faut entendre les critiques et nous avons
fait le choix de la stabilité cette année afin de
prendre le temps d’évaluer ces dispositifs et de les
adapter à la double exigence de bonne utilisation des
deniers publics et de financement de nos économies.
Il faudra donc mettre à profit les prochains mois
pour nourrir le débat et le gouvernement compte sur
la participation active de tous les acteurs
économiques des outre-mer comme la Fedom.
Nos territoires présentent de formidables atouts. La
formule a tellement servi qu’elle peut sembler
rebattue. Mais le président de la République a pris
des engagements forts pour relancer les économies
des outre-mer.
Trente engagements, très précisément.
Et jusqu’ici, nous sommes en ligne avec ces
engagements.
D’autres, avant nous, ont parlé de « développement
endogène ». Le concept, fort séduisant à l’oreille, a
fort mal dissimulé une réalité moins reluisante et
plus douloureuse : celle d’un désengagement
progressif de l’Etat de nos territoires.
Aujourd’hui, c’est un retour de l’Etat que nous avons
décidé d’engager. Un Etat qui fédère les énergies et
accompagne ceux qui créent et qui entreprennent.
Nos territoires ont une jeunesse de plus en plus
formée, de plus en plus talentueuse qui attend qu’on
lui donne sa chance. Nos territoires recèlent l’or vert,
l’or noir, l’or jaune et l’or bleu. La mer qui, grâce aux
outre-mer, donne à la France la deuxième zone
exclusive du monde derrière les Etats-Unis.
Cette richesse, nous devons apprendre à mieux la
protéger et à mieux la valoriser. C’est l’une de ces
nouvelles frontières que nous devons franchir pour
que les outre-mer soient de nouvelles zones de
croissance. Et de croissance durable.
Faisons-le ensemble.
Je vous remercie.