XVIE CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS DES RUP SESSION PARTENARIALE DU
28 OCTOBRE 2010
Monsieur le Président du Gouvernement des Canaries, Monsieur le Commissaire européen,
cher Johannes, Mesdames et Messieurs les représentants des Ministres des affaires
européennes de l’Espagne et du Portugal, Messieurs les Présidents des régions
ultrapériphériques, Monsieur le Président du Conseil général de Mayotte, Monsieur le
Premier ministre du Cap vert, Mesdames et Messieurs les représentants de la Commission
européenne,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse de participer à cette XVIème Conférence des «Régions Ultra-Périphériques»
et je tiens tout d’abord à vous remercier, Monsieur le Président du Gouvernement des
Canaries, pour votre invitation et pour votre accueil, toujours aussi chaleureux. Nous
assisterons tout à l’heure à la cérémonie de « passage du relais » entre vous-même et le
Président de la Région Martinique, Serge LETCHIMY, que je salue bien cordialement. C’est
l’occasion pour moi de vous remercier, et de remercier votre équipe, les fonctionnaires des
Canaries et tous les collaborateurs qui vous ont assisté dans l’important et fondamental travail
réalisé sous votre Présidence. Je vous ai aussi écouté avec attention à Bruxelles. Vous avez
parlé avec votre coeur et de cela aussi, Monsieur le Président des Canaries, je tiens à vous en
remercier.
Comme vous l’avez rappelé, cette Conférence se situe à un moment charnière, à un moment
où plusieurs agendas se rencontrent :
- d’abord, dans quelques jours, le 5° « rapport sur la cohésion » sera diffusé, nous allons
certainement l’évoquer tout à l’heure ;
- ensuite, la communication de la Commission relative au réexamen du budget de l’Union
européenne, qui vient d’être adoptée, va lancer la réflexion sur la réforme des politiques
de l’Union européenne dans le cadre de la négociation du prochain cadre financier;
- enfin, notre réflexion « RUP », qui est déjà bien avancée, doit maintenant aboutir à une
«Communication» de la Commission.
J’en tire la conclusion que c’est dès à présent que se prépare 2014.
C’est la raison pour laquelle je souhaite délivrer aujourd’hui un triple message, dans le
respect du mémorandum RUP/Etats membres :
- d’abord, tirer toutes les conséquences pour les RUP du calendrier de la négociation du
futur cadre financier ;
- ensuite, vous faire part de quelques réflexions pour l’avenir ;
- enfin, aborder la question des stratégies régionales.
Le mémorandum des RUP ainsi que le mémorandum conjoint RUP/Etats-membres
constituent une base de travail riche, que nous avons commencé à exploiter.
Je souhaite que l’on puisse ensemble donner des suites concrètes à ces documents stratégiques
et que l’on veille, en s’appuyant sur notre partenariat avec la Commission européenne et le
Parlement européen, à la prise en considération appropriée des RUP dans le débat budgétaire
qui s’amorce au niveau européen.
Or, si nous voulons aujourd’hui concrétiser notre mémorandum, il nous appartient de ne pas
«manquer le train des négociations».
Dans ce contexte, il me semble que nous ne pouvons pas attendre 2012 pour définir ce que
sera la future stratégie européenne à l’égard des régions ultrapériphériques, car à cette
date, le cadre des prochaines perspectives financières aura été vraisemblablement arrêté.
En effet, la Commission européenne doit présenter ses propositions pour le prochain cadre
financier pluriannuel avant le 1er juillet 2011. C’est pourquoi, Cher Johannes, je souhaite
que la commission puisse, en étroit partenariat avec les RUP, intégrer par écrit nos
objectifs dans ces propositions, notamment, relatives aux futurs cadres financiers.
Afin de contribuer concrètement à cet exercice, notre Conférence pourrait proposer la mise en
place de groupes de travail Commission -Etats-membres et RUP, sur les problématiques-clés
que nous avons déterminées dans notre Mémorandum, et qui appellent à une réflexion
partagée ; je pense notamment à :
- la coopération territoriale et les stratégies régionales intégrées ;
- l’accès des RUP au marché intérieur, au nom du principe de l’égalité des chances, et
l’équilibre entre marché intérieur et insertion régionale ;
- les domaines dans lequel les RUP ont une valeur ajoutée tels que l’environnement et
l’énergie.
Bien entendu, ce ne sont que des exemples que je vous soumets aujourd’hui.
Le deuxième point que je souhaiterais aborder avec vous estcelui des grandes
orientations que nous avons définies pour l’avenir. Il nous appartient désormais de les
affiner et je souhaiterais, à cet égard, vous faire part de quelques réflexions :
=> D’abord, comment maintenir et pérenniser les instruments et les dispositifs qui nous
sont les plus adaptés et les plus utiles ?
Dans mon esprit, ce « maintien des instruments existants » concerne non seulement les fonds
structurels, mais aussi l’allocation spécifique de compensation des contraintes des RUP, le
POSEI, l’octroi de mer ainsi que les aides d’Etat.
Bien évidemment, il ne s’agit pas de préempter nos discussions nationales sur les perspectives
financières, mais je souhaite appeler votre attention sur deux cadres d’intervention spécifiques
aux RUP qui me semblent requérir une réflexion particulière : l’allocation de compensation
des contraintes, d’une part ; le POSEI, d’autre part.
L’allocation de compensation des contraintes est juste car elle correspond à la prise en compte
par l’Union de la réalité des RUP. Elle facilite aussi l’accès des RUP au marché intérieur dans
des conditions égales à celles des autres régions européennes. Son principe est donc
important. Aussi, il nous a paru utile de lancer d’ici la fin de l’année 2010 une étude à mi-
parcours destinée à formuler des recommandations pour le futur.
Le POSEI est quant à lui l’expression de l’adaptation des politiques européennes à la réalité
des RUP. Nous en souhaitons, par conséquent, pour la prochaine période, le maintien, sur la
base de l’article 349. Ce maintien doit concerner tant l’enveloppe que le mécanisme. En outre,
la pêche pour nous en fait partie, l’article 349 ne devant pas se limiter au seul volet agricole !
Ceci me conduit naturellement à une deuxième réflexion : comment veiller à un
traitement favorable et spécifique des RUP dans le prochain cadre
communautaire ?
Je me félicite que le nouvel article 349 du Traité de Lisbonne conforte le champ des
adaptations possibles. Il s’agit désormais de veiller à sa parfaite prise en compte dans la
conception et la mise en oeuvre des politiques européennes.
La Commission européenne doit pouvoir donner aux Etats-membres la garantie que les
adaptations au droit européen, dans les domaines définis par l'article 349 du Traité, sont
rendues possibles et ce, dans la durée.
Or, nous constatons de ce point de vue une évolution qui me paraît préoccupante : nous avons
de plus en plus de mal à faire apparaître cette base, alors même qu’elle figure dans le Traité.
Je citais tout à l’heure le POSEI, ce n’est pas par hasard ! Je demande donc que l’article 349
puisse être mentionné, systématiquement et sans ambigüité, dès lors qu’il s’agit des RUP.
Ceci doit être compris et accepté de tous les services de la Commission.
Troisième réflexion : quels sont les domaines dans lesquels les RUP pourraient
être moteurs sur le plan européen ?
La stratégie européenne à l’égard des RUP doit avoir pour objectif le développement
«intelligent, durable et inclusif» des RUP, en visant l’exploitation de leurs atouts propres et la
croissance des secteurs d’excellence, sans pour autant occulter, ni les contraintes structurelles
spécifiques auxquelles nous faisons face, ni le rôle joué par les secteurs traditionnels. Bref,
notre intérêt est celui de la meilleure prise en compte possible de « Europe 2020 » dans la
stratégie des RUP.
C’est précisément le message que nous avons délivré dans le Mémorandum signé le 7 mai
dernier.
Les RUP peuvent être des modèles et des terrains d’expérimentation des politiques
européennes, elles peuvent notamment être des modèles de croissance verte, mais il nous faut
pour cela établir des synergies entre la protection de l’environnement et la croissance.
L’Europe doit pouvoir soutenir les RUP dans ce sens, à travers une approche et des politiques
appropriées.
Mais je le redis ici, cette valorisation des atouts uniques des RUP ne peut se faire que dans le
cadre d’un juste équilibre avec la compensation de leurs contraintes.
Le dernier point que je souhaite aborder avec vous est celui de nos stratégies de
coopération régionale.
A cet égard, deux sujets me tiennent particulièrement à coeur : la question de la coopération
territoriale de nos RUP et celle des accords commerciaux que l’Union européenne signe avec
des Etat-tiers faisant partie de l’environnement des RUP.
Comme nous l’avons écrit dans le Mémorandum, l’insertion régionale demeure un axe
essentiel de la stratégie de développement de nos RUP. Nos échanges, lors de notre premier
Forum sur l’ultrapériphérie européenne, en ont aussi largement témoigné. Je crois qu’il nous
faut désormais penser différemment la coopération et l’insertion territoriale de nos RUP.
Il semble en effet aujourd’hui évident que la coopération territoriale, telle qu’elle actuellement
définie et mise en oeuvre, n’est pas en mesure d’intégrer les spécificités des RUP, et
notamment leur environnement régional.
Dans une Europe élargie dont les équilibres sont modifiés, les frontières externes de l’Union
européenne que sont nos RUP sont celles de l’Europe tout entière. Aussi, la création d’un
cadre d’intervention approprié est indispensable. Je défends le principe 9 d’une
coopération territoriale active au voisinage des RUP, dans un esprit «gagnant-gagnant ».
Et je rebondis sur la proposition de la Commission de raisonner par zone de coopération et de
réfléchir à l’élaboration de stratégies régionales par zone, à l’exemple des stratégies de la mer
Baltique et du Danube.
Cette coopération territoriale encouragerait bien évidemment les RUP à l’ouverture sur leur
environnement régional. S’agissant des RUP françaises, cet encouragement prend d’ores et
déjà plusieurs formes : possibilité de mettre en place des « représentations » au sein des
ambassades de France ; recherche d’un statut amélioré au sein des organisations régionales ;
et surtout recherche du développement des relations commerciales avec les pays voisins. Car
le véritable « marché intérieur » de nos RUP n’est-il pas celui des pays proches ? Mais cette
évolution suppose, encore une fois, un article 349 du Traité bien compris et bien accepté par
tous…
Par ailleurs, les accords commerciaux conclus par l’UE dans les régions concernées par
cette stratégie doivent prendre en compte les intérêts des RUP :
Si l’on souhaite renforcer les échanges commerciaux avec les pays tiers, il est nécessaire de
veiller à une bonne complémentarité économique et à ne pas mettre en péril les équilibres de
nos économies.
C’est pourquoi une des premières mesures à prendre me semble la mise en place d’analyses
d’impact de ces accords sur les RUP par la Commission européenne. Pourquoi ? Tout
simplement pour agir le plus en amont possible, donc de préférence avant la signature de
l’accord, lorsque cela est possible.
Lorsque l’accord est déjà signé, cette étude d’impact est quand même utile, de façon à
analyser les conséquences de l’accord sur nos échanges.
Cette meilleure connaissance de l’évolution de nos marchés ne peut qu’avoir des effets
positifs en permettant aux acteurs économiques d’agir en toute connaissance de cause.
Je voudrais maintenant terminer, Monsieur le Président du gouvernement des Canaries, en
vous remerciant pour votre remarquable action depuis deux ans.
Je souhaite que les travaux conduits par la prochaine Présidence, la Martinique, soient tout
aussi fructueux. Notre soutien et notre appui, cher Président LETCHIMY, vous sont acquis.
Vous le savez – et j’en terminerai par là – nos territoires ont engagé des évolutions
institutionnelles qui ont des conséquences concrètes. J’ai donc le plaisir de saluer l’arrivée de
Saint-Martin dans la « famille des RUP », ainsi que la présence parmi nous de Mayotte, qui
souhaite devenir une RUP, démarche que nous soutenons pleinement et activement.
Un chaleureux « merci » à tous les acteurs de cette XVIème conférence des Présidents de
RUP.
Merci beaucoup aux Canaries.
Muchas gracias Canarias !