Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement aux questions d'actualité.
Suites du sommet social
M. Gérard Longuet . - (Applaudissements à droite) Monsieur le Premier Ministre, le dialogue social n'est pas simplement une nécessité, c'est un devoir impérieux dans une crise dont on
ne connaît ni l'ampleur ni la durée. Il est indispensable pour assurer notre cohésion, dans un pays qui ne peut seul régler les problèmes du monde.
M. Gérard Longuet. - Ce dialogue social repose sur un diagnostic
partagé. Le chemin à parcourir est immense. Le Gouvernement et le Président de la République l'ont entamé en confiant à Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'Insee, une mission sur le
partage de la valeur ajoutée, une mission sur un conseil de suivi de la crise, des politiques économiques et sociales, une nouvelle gouvernance de l'entreprise pour assurer la transparence, et
donc une éducation économique.
Monsieur le Premier ministre, vous qui avez écrit « La France peut supporter la vérité », quelle est la politique du Gouvernement pour que cette vérité soit un bien commun,
partagé ? Au-delà du jeu de rôles des partenaires sociaux...
M. Gérard Longuet. - ...l'opinion doit avoir conscience de la
vérité de la situation. Ce diagnostic partagé doit avoir de la profondeur dans le temps...
M. Gérard Longuet. - ...sans oublier la dimension internationale et
européenne nécessaire pour nous situer face à nos partenaires qui sont, hélas, aussi nos concurrents.
M. Gérard Longuet. - Quelle sera la politique du Gouvernement pour
que la France soit lucide sur elle-même ? (Applaudissements à droite)
M. François Fillon, Premier ministre . - Depuis le début de cette crise, dans des circonstances
inédites, nous essayons d'apporter des réponses réactives à des réalités, non pas à des fantasmes ou des émotions. (Mme Éliane Assassi
s'exclame)
Notre pays a réagi globalement mieux à la crise financière que d'autres. Nous devons maintenant faire face à une crise économique liée à une baisse des investissements, de l'activité et des
exportations, non de la consommation, qui a augmenté de 0,3 % au troisième trimestre et de 0,5 % au quatrième. (Mme Nicole Bricq
s'exclame) D'où nos mesures de relance de l'activité, à travers le soutien à l'investissement.
Nous faisons face désormais aux conséquences du ralentissement économique sur l'emploi. Les vrais victimes de la crise, ce sont les Français qui perdent leur travail ou voient leur temps de
travail, et donc leur salaire, diminuer. Nous avons donc décidé hier, avec les partenaires sociaux, de porter à 75 % du salaire brut, 90 % du salaire net, l'indemnisation de
l'activité partielle. S'y ajoutent des dispositifs spécifiques pour ceux qui ont travaillé moins de quatre mois, ainsi que pour les familles les plus modestes. La réduction d'impôt ambitieuse
pour les revenus se situant entre 1 200 et 3 500 euros est une mesure de justice pour ceux qui n'ont jamais droit à rien. En matière de relance par la consommation, c'est bien
plus juste qu'une baisse uniforme de la TVA ! (Protestations à gauche)
M. François Fillon, Premier ministre. - Si nécessaire, nous adapterons notre réponse, comme nous venons de le faire
pour le secteur automobile. Le dialogue social peut être rude, mais c'est une réalité. J'en veux pour preuve le record de signatures d'accords conventionnels depuis un an, les derniers en date
concernant l'assurance chômage et la formation professionnelle. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Daniel Marsin . - Monsieur le Premier
ministre, depuis un mois, la Guadeloupe traverse une crise pour laquelle on ne voit, à l'heure actuelle, aucune issue. Pire, depuis trois jours, le mouvement de protestation se double d'une
situation insurrectionnelle, presque une guérilla, marquée par des affrontements entre jeunes et forces de l'ordre, des pillages de magasins, des voitures brûlées, des barrages routiers, des
tirs à balles réelles, des blessés graves et, depuis hier, un mort. Je m'incline devant sa mémoire.
Comment en est-on arrivé là ? Les élus de la Guadeloupe n'ont cessé d'alerter le Gouvernement ; j'ai moi-même, à la suite du déclenchement du mouvement par le LKP, souligné le sérieux
et la portée de ses revendications. Plus personne ne peut ignorer le profond malaise de la population guadeloupéenne ; il est l'expression d'une crise économique et sociale, mais aussi
identitaire, qui appelle une réponse globale. Il faut des mesures d'urgence pour que nos compatriotes puissent faire face à la vie chère ; il faut aussi, dans un second temps, que le
Gouvernement et ses successeurs témoignent de davantage d'intérêt, de considération et d'intérêt pour l'outre-mer. Il est temps d'en finir avec les vieux clichés.
Comme les Français de métropole, mais dans une tout autre proportion, les Guadeloupéens subissent une telle dérive des prix qu'ils sont certains d'être spoliés par une oligarchie économique et
un système d'approvisionnement qui a bénéficié de la passivité, sinon de la caution, des services de l'État. Ce n'est plus acceptable. Il importe de mettre à plat le dossier de la formation des
prix outre-mer et de faire cesser l'exploitation outrancière dénoncée par le LKP. Là où un travailleur métropolitain au Smic peut acheter 625 paquets de pâtes, son homologue guadeloupéen
ne peut en acheter que 425... Les 200 euros supplémentaires réclamés par le LKP correspondent au rattrapage de cette injustice.
Après un mois de crise, de manifestations et de blocages, quelle réponse allez-vous apporter, autre que policière, aux Guadeloupéens, monsieur le Premier ministre ? Que comptez-vous faire
pour renouer le fil du dialogue ? Confirmez-vous devant le Sénat les annonces que vous avez faites ce matin ? (Applaudissements sur les bancs RDSE
et sur quelques bancs à droite)
M. François Fillon, Premier ministre . - La crise sociale que traverse la Guadeloupe est ancienne
et tire son origine de l'organisation économique de l'île -cela vaut d'ailleurs pour les autres départements d'outre-mer. Elle est aggravée, mais aggravée seulement, par la crise mondiale. La
violence s'est récemment déchaînée avec des barrages et des attaques contre des commerces ou des entreprises, et un meurtre a été commis, dont les responsables seront poursuivis et jugés ;
rien ne justifie que l'on tire ainsi sur un homme qui exerçait en toute légalité ses fonctions de syndicaliste. Jusqu'alors, le mouvement s'était déroulé de façon pacifique, en utilisant les
moyens que permet la Constitution.
Dès le premier jour, le Gouvernement a cherché à résoudre la crise. (Mouvements divers à gauche) Le secrétaire d'État à l'outre-mer s'est
rendu en Guadeloupe et a réussi à négocier avec le collectif 131 des 132 revendications de celui-ci, qu'il s'agisse du prix de l'essence, désormais inférieur à ce qu'il est en
métropole, de la mise en oeuvre anticipée du RSA dès 2009 ou du gel des loyers. Il est vrai que les négociations ont buté sur la question des salaires. Le Gouvernement était prêt à relayer la
revendication du collectif sur ce point, à aider à une médiation, mais en aucun cas, l'État ne saurait se substituer aux entreprises privées et payer à leur place. Ce serait irresponsable.
Depuis plusieurs jours, des médiateurs sont sur place -leur présence est justifiée par l'absence de tradition de dialogue social dans l'île- et travaillent avec le patronat comme avec le
collectif ; ils ont mis au point une réponse qui a été portée à 15 heures sur la table des négociations. Il s'agit d'une proposition nouvelle, qui consiste en une augmentation
significative des salaires à la charge des entreprises, assortie d'un mode de calcul spécifique pour le RSA, en Guadeloupe comme dans les autres départements d'outre-mer.
Il nous faudra ensuite -ce sera l'objet de la réunion qui se tient aujourd'hui sous la présidence du Président de la République- engager la réflexion pour donner aux départements d'outre-mer
des structures économiques et peut-être institutionnelles à même de prévenir de nouvelles crises. (Applaudissements au centre et à droite)
M. le président. - Devant l'inquiétude de nos collègues d'outre-mer et pour marquer l'attention que porte le Sénat aux difficultés de leurs territoires,
la Conférence des Présidents, avec l'accord de tous les groupes, a décidé de constituer une mission commune d'information chargée d'évaluer la situation outre-mer et de faire toutes
propositions utiles pour trouver des solutions à moyen et long terme. (Applaudissements au centre et à droite)
Taxe professionnelle
M. Jean Boyer . - Le Président de la République a
annoncé, le 5 février, la suppression de la taxe professionnelle, décision qui a interrogé nombre d'observateurs, au premier rang desquels les élus locaux. Lundi dernier, le Premier
ministre a promis qu'en dépit de cette suppression, les ressources des collectivités territoriales seraient préservées. Que penser de cet enchaînement d'annonces ?
La taxe professionnelle est une ressource fiscale essentielle pour de nombreuses collectivités et un levier majeur au service du développement économique. Les annonces successives du Président
de la République et du Premier ministre soulèvent deux questions. Sur la forme d'abord : la suppression de la taxe professionnelle a été décidée sans attendre les conclusions du comité
Balladur, qui doit entre autres faire des recommandations en matière de fiscalité locale. On est loin de ce processus de codécision dont on parle tant...
Il est difficile de chiffrer précisément la perte de revenus à compenser : 8, 11 ou 22 milliards d'euros ? En outre, l'abolition de la taxe professionnelle sur les équipements
bruts mobiliers et non sur les biens fonciers risque de créer une forte distorsion entre les collectivités.
Les mesures de compensation prévues, comme l'instauration de la taxe carbone, paraissent insuffisantes. A l'heure où l'État fait appel aux collectivités territoriales pour investir afin de
lutter contre la crise, il donne l'impression d'ignorer leurs besoins. Pouvez-vous donc nous indiquer précisément quelles dispositions vous comptez prendre à cet égard ?
Notre assemblée se préoccupe, vous le savez, des relations entre l'État et les collectivités territoriales. Celles-ci doivent être justes et transparentes, afin que chacun assume pleinement ses
responsabilités. (Applaudissements sur les bancs de l'Union centriste)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales
. - (Applaudissements à droite) La France est le seul pays d'Europe à soumettre les entreprises à un impôt qui pénalise celles qui investissent
et profite à celles qui importent.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Il y a déjà longtemps que le Président de la République s'est engagé à
supprimer cette taxe.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Elle a été inventée il y a des années, et je constate que la gauche n'y a
jamais touché lorsqu'elle était au pouvoir. (On le conteste sur les bancs socialistes)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Je tiens à rassurer M. Boyer : le manque à gagner d'environ
22 milliards d'euros occasionné pour les collectivités locales par la suppression de la taxe professionnelle sera intégralement compensé. D'autres impôts seront mis en place, qui
garantiront l'indépendance financière des collectivités.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Nous attendons les conclusions de la commission Balladur pour faire un choix
entre les différentes possibilités qui s'offrent à nous. (On ironise à gauche) Nous le ferons naturellement en concertation avec les associations
d'élus locaux et le Parlement.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Nous aurons donc l'occasion d'en débattre très prochainement. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Pierre Sueur. - Mme la ministre n'a pas répondu à la
question !
Situation économique et sociale dans les DOM
M. Claude Lise . - Ma question s'adresse à
M. le Premier ministre, même s'il ne semble pas vouloir répondre aux élus d'opposition de l'outre-mer. (M. François Fillon, Premier ministre, s'en
défend) La Guadeloupe est en proie depuis un mois à un mouvement social d'une ampleur inédite, qui est en train de s'envenimer : on déplore déjà la mort d'un homme, et je veux
adresser à sa famille, à ses proches et au peuple guadeloupéen tout entier un message de sympathie et de solidarité. La Martinique connaît elle aussi, depuis plus de dix jours, un mouvement
syndical et citoyen sans précédent. Si l'on y ajoute les événements de la Guyane et de la Réunion, on constate que dans aucun des départements d'outre-mer, la population ne peut supporter plus
longtemps les effets d'une crise sociale qui se caractérise par un taux de chômage cinq fois supérieur à celui de la métropole et qui constitue un triste record en Europe, ainsi que par un coût
de la vie insupportablement élevé.
Cette crise ne peut être considérée comme un simple effet de la crise financière et économique mondiale. Les racines en sont anciennes et plusieurs d'entre nous n'ont cessé de lancer des cris
d'alarme qui n'ont jamais été entendus. Il s'agit d'une véritable révolte des citoyens d'outre-mer contre la condition qui est la leur, dans des sociétés qui subissent encore l'héritage du
passé colonial et sont marquées par beaucoup trop d'abus, d'injustices, de discriminations et d'atteintes à la dignité des personnes.
Je ne reviendrai pas sur les erreurs commises par le Gouvernement dans la gestion de cette crise ni sur le silence assourdissant du Président de la République.
M. Claude Lise. - Ce qui importe, c'est de savoir si le Gouvernement a
enfin pris la mesure des enjeux et compris la nécessité de trouver une issue pacifique à la crise, en renonçant à la répression dont on connaît les conséquences... Le Gouvernement reconnaît-il
que le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer est gravement inadapté ? Il faut réécrire ce texte en menant au préalable une large concertation, dégager de nouvelles
marges financières et répondre d'urgence à certaines revendications légitimes des collectifs de Guadeloupe et de Martinique en ce qui concerne le pouvoir d'achat, le contrôle des prix et le
logement social.
Le Gouvernement respectera-t-il les engagements qu'il a pris avec les syndicats et le patronat, notamment en Guadeloupe -le président Gillot y insiste-, par le préaccord du 8 février
dernier sur la revalorisation des bas salaires en contrepartie d'allégements de charges sociales pour les TPE ? Au-delà de l'urgence, le Gouvernement est-il prêt à engager une réflexion
approfondie avec les élus et les forces vives de nos territoires pour repenser le mode de développement des DOM, leurs rapports avec l'État et leur organisation institutionnelle ? (Applaudissements à gauche)
M. François Fillon, Premier ministre . - Je n'ai jamais refusé de répondre à l'opposition :
j'ai eu plusieurs fois l'occasion de m'entretenir avec vous, je me suis rendu à deux reprises dans votre département et je crois avoir tenu mes engagements. (Applaudissements à droite, protestations à gauche)
Nous partageons le constat que vous venez de dresser, et c'est bien pour cela que nous avons mis en chantier le projet de loi pour le développement de l'outre-mer, qui sera débattu ici même
dans quelques semaines. (Mme Éliane Assassi ironise) Les
problèmes que connaissent les DOM ne datent pas d'hier : leurs structures économiques et peut-être institutionnelles doivent être profondément réformées.
Vous m'interrogez, monsieur Lise, pour savoir si le Gouvernement est prêt à agir : nous allons justement tenir dans quelques instants une réunion à laquelle vous allez vous-même
participer. Nous jouerons cartes sur table, et nous verrons si les élus de l'outre-mer sont prêts eux aussi à accepter le changement. (Protestations à
gauche)
M. François Fillon, Premier ministre. - Nous mettrons en oeuvre des mesures d'urgence pour surmonter la crise en
Guadeloupe, et ces mesures seront étendues aux autres départements d'outre-mer.
Vous m'avez également demandé si le Gouvernement était prêt à compenser intégralement les hausses de salaires par l'impôt.
M. Didier Boulaud et Mme Nicole Bricq. - Il n'a jamais dit cela !
M. François Fillon, Premier ministre. - Comment peut-on soutenir une pareille idée ?
Avec une telle demande (on proteste vivement, sur les bancs socialistes, que tel n'était pas le propos de M. Lise) -c'est bien à cela que cela
revient !-, vous facilitez la négociation du patronat qui n'a plus qu'à attendre que l'État apporte sa contribution. (Mêmes mouvements) En aucun
cas, l'État n'acceptera que la croissance des salaires dans les entreprises privées soit prise en charge par l'impôt ; cela relève des seules relations entre les partenaires sociaux.
(Applaudissements sur les bancs UMP)
Crise à la Réunion
Mme Gélita Hoarau . - Avant de poser ma
question, permettez-moi d'exprimer ma solidarité et celle de mon groupe à la famille et aux proches de Jacques Bino, le syndicaliste guadeloupéen tué récemment.
Monsieur le Premier ministre, la crise qui frappe les DOM est particulièrement grave et profonde, elle touche de larges couches sociales. Les plus frappés sont, à la Réunion, les 52 % de
la population vivant en dessous du seuil de pauvreté, qui doivent faire face au taux de chômage le plus élevé de la République et de toutes les régions de l'Union européenne et qui voient leur
pouvoir d'achat s'éroder régulièrement par un coût de la vie qui ne cesse de croître.
Cette population déshéritée attend des mesures d'urgence, comme une baisse substantielle et durable des prix des produits de première nécessité. Le Gouvernement est-il prêt à prendre les
mesures qui s'imposent, notamment à lutter contre les monopoles et leurs surprofits ? Ce qui a été possible en métropole peut l'être à la Réunion, en répercutant au profit du consommateur
les marges arrière des grandes surfaces. C'est nécessaire mais la solution durable serait un approvisionnement de l'île à partir des pays de la zone, à des coûts de départ deux à trois fois
plus bas et à une distance quatre fois moindre.
Cette population attend aussi une baisse des loyers et du prix des transports en commun, ainsi que la gratuité des transports et cantines scolaires. Le Gouvernement est-il disposé à ouvrir ces
chantiers avec les intéressés et les organismes concernés ?
Dans l'immédiat, il faut aussi répondre à l'attente de nos milliers de jeunes diplômés sans emploi qui voient la majeure partie des cadres de la fonction publique et du privé recrutés à
l'extérieur. Leur frustration est grande.
Il est urgent de satisfaire ces revendications si vous voulez éviter que la désespérance ne se transforme en colère et en révolte. Mais il faudra aussi revaloriser les minima sociaux et les
petites retraites.
La sortie de crise est aussi liée à l'élaboration d'un projet de développement global et durable. Ayons le courage, monsieur le Premier ministre, de remettre en cause les recettes utilisées
jusqu'à présent dans les DOM et d'écouter les forces vives de nos pays et les institutions qui portent des projets comme le Plan régional de développement durable de la région, en cohérence
avec le projet « île verte » et le projet « Réunion 2030-Gerri ». (Applaudissements à
gauche)
M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer . - A toutes vos questions, le Gouvernement
répond oui.
Oui, le Gouvernement est prêt à mettre à plat la situation économique de l'outre-mer.
Oui à l'effort de solidarité renforcée, avec le RSA qui, outre-mer, va toucher 120 000 travailleurs.
Oui pour les cantines scolaires, dont la part financée par la puissance publique va augmenter de 20 %, à condition que ces cantines utilisent des produits locaux plutôt que d'importer de
Nouvelle-Zélande la nourriture de la Réunion ou des Antilles. (Applaudissements à droite)
Oui, nous allons consacrer 54 millions à l'aide aux intrants agricoles pour améliorer la production locale.
Oui, la réunion de tout à l'heure vous montrera que le Gouvernement est déterminé à apporter des réponses à cette crise dont les racines sont profondes. Oui, nous ferons ensemble entrer
l'outre-mer dans le XXIe siècle ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
Crise à la Guadeloupe
Mme Lucette Michaux-Chevry -
(« Ah » à droite) La situation de la Guadeloupe est particulièrement préoccupante. Il règne dans mon département un climat insurrectionnel
qui n'est pas acceptable sur le territoire de la République. Chacun a ses responsabilités dans la situation actuelle. L'État n'a pas su rétablir les liens entre l'île et la France métropolitaine.
En 1952, le ministre de l'intérieur d'un gouvernement de gauche a fait tirer sur les travailleurs de la canne qui demandaient des hausses de salaire légitimes. (Voix à droite : « Mitterrand ! ») En 1960, c'est un gouvernement de droite qui a fait déporter des Guadeloupéens qui réclamaient
l'indépendance.
Les responsabilités sont aussi du côté des collectivités territoriales. Dans mon département, comment accepter la disparition de la commande publique, le fait que le problème des ordures
ménagères ne soit pas réglé, le manque d'eau, le problème des 50 pas géométriques qui demeure pendant, comme celui du fret. Quand je dirigeais le conseil général, j'ai écrit au ministre
Christian Paul pour évoquer la question de la Sara et le prix scandaleux du carburant ; il a découvert cette réalité et a dû arrêter le douanier qui ne la connaissait pas.
Les responsabilités sont aussi du côté de la population, qui considère le revenu minimum d'insertion comme un salaire normal, ou de ceux qui ont développé un habitat social qui défigure cette
belle île.
Les Guadeloupéens souffrent quand des métropolitains voudraient débarrasser la République de ces îles. « Qu'on leur donne l'indépendance » disent-ils. Mais vous, madame la ministre de
l'intérieur, vous connaissez bien la réalité de l'outre-mer. Dites-nous comment vous allez rétablir un espace de droit sur tout le territoire national et comment vous pensez renouer les liens
d'affection qui attachent ces terres lointaines à la France. (Applaudissements sur les bancs UMP)