Guadeloupe : le LKP estime qu'un accord sur les salaires est possible
Pointe-à-Pitre, Fort-de-France, envoyés spéciaux
A zéro heure, jeudi 26 février, après neuf heures de négociations, un membre du Collectif LKP est venu annoncer, devant la capitainerie de Pointe-à-Pitre, sous les applaudissements et les cris : "Les 200 euros on les a attrapés !". Après cinq semaines de grève en Guadeloupe, le soulagement était certain. Pas le temps de crier victoire. Rosan Mounien, syndicaliste de longue date de l'UGTG est remonté en réunion, sourire aux lèvres. Vers 3 heures du matin, Elie Domota, le porte-parole du collectif, plus mesuré et plus technique dans son expression, est venu confirmer qu'un accord était possible.
A Paris, depuis 48 heures, les conseillers de l'Elysée et Matignon travaillaient à une simplification de leur proposition sur le RSA jugée trop peu " lisible". Sans céder sur la demande du patronat d'exonérer leur prime de la CSG et la CRDS, Matignon est parvenu à mettre sur la table un "revenu supplémentaire temporaire d'activité" de 80 euros. Un forfait mensuel destiné aux 45 000 salariés guadeloupéens touchant jusqu'à 1,4 Smic, et qui ne tiendra plus compte de la situation familiale.
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Elie Domota, porte-parole du LKP, a indiqué, jeudi 26 février, qu'un accord est possible suite à la proposition faite par le gouvernement.
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Le chiffre "magique" de 200 euros auquel le Collectif s'est accroché pendant des semaines, est atteint. Ce dernier coup de pouce, s'ajoute à la contribution des collectivités locales, 50 euros et à celle du patronat, entre 50 et 90 euros exonérés de charges patronales et sociales. Il y a encore "quelques bitins (choses) techniques" à régler. Ce ne sont pas des détails. Mais le collectif contre la "pwofitasyon " tenait absolument à finir la séquence de ces jours fériés de carnaval, mardi gras et mercredi des Cendres, avec une annonce, fut-elle à consolider.
Il y a eu de la bagarre à l'intérieur de la salle de négociations. Elie Domota, porte-parole du Collectif, et Willy Angèle, président du Medef Guadeloupe, ont failli en venir aux mains. Une sorte d'affrontement entre hommes, et bien plus que cela : le choc frontal entre deux mondes et des intérêts contradictoires qui ne sont jamais rencontrés. Alors que l'accord était proche, M. Angèle a commencé à exclure du dispositif un secteur, puis deux, puis trois et plus, provoquant la colère du leader du LKP. "C'est un jeu de scène. Dans une négociation, il y a toujours un peu de théâtre", a minimisé un syndicaliste.
Pourtant, il faut régler les questions pendantes qui demanderont encore des heures de palabres : les salariés sont-ils concernés jusqu'à 1,4 smic ou 1,6 ? Calculera-t-on l'augmentation sur le brut "nu" ou avec le 13e mois et les primes ? La date d'effet du dispositif est-elle immédiate ou différée au… 1er avril, comme le souhaite l'Etat ? Est-ce un accord à durée déterminée ? M. Domota a aussi demandé que les jours de grève soient réglés. Rendez-vous est pris pour 8 heures au stadium de Baie-Mahault, en face de Destreland, avec une recommandation : la mobilisation ne doit pas encore faiblir.
COUPS DE FEU EN MARTINIQUE
En Martinique, des échauffourées ont opposé pour la deuxième nuit consécutive des jeunes aux forces de l'ordre. Des coups de feu ont été tirés. Un gendarme, un policier et un jeune ont été blessés. Les incidents ont débuté sur le front de mer et avenue du général de Gaulle, à Fort-de-France, où avaient convergé en début de soirée des dizaines d'adultes et d'adolescents cagoulés. Les gendarmes ont rapidement fait usage de gaz lacrymogène. Circulant en deux-roues, les jeunes se sont ensuite dispersés dans la ville, allumant des feux de poubelles et improvisant des barrages. Plusieurs magasins ont été dévalisés.
"L'Etat n'a pas mesuré la gravité de la situation, a estimé Serge Letchimy, député-maire (Parti progressiste martiniquais) de Fort-de-France. Il y a une remontée d'une profondeur dont on n'estime pas l'importance aujourd'hui".
Michel Monrose, président du "Collectif du 5 février 2009", qui organise le mouvement social, avait affirmé, mercredi 24 février, que la responsabilité des incidents incombait au patronat qui retarde la conclusion d'un accord. Les négociations sur les augmentations de salaire, qui se montent en Martinique à 354 euros, devaient reprendre jeudi.
Béatrice Gurrey et Benoît Hopquin